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Découvrons le monde génomique

mars 2009

En décembre dernier, l’ANRS communiquait sur de nouvelles découvertes génétiques. Trois régions du génome impliquées dans le contrôle de la maladie ont été mises en évidence. Quelles conséquences ?

Quelques bases

L’ADN (Acide DésoxyriboNucléique) support de l’information génétique, est formé de deux chaînes de nucléotides enroulées en double hélice et dont le sucre est le désoxyribose. C’est le constituant principal des chromosomes situés dans le noyau de chaque cellule.

Les gènes sont des segments d’ADN portés par les chromosomes, qui conservent et transmettent les caractères héréditaires des êtres vivantEs. Le génome est l’ensemble du support matériel de l’hérédité, soit environ 20 000 gènes pour le génome humain. Le génome d’une cellule est formé de tout l’ADN qu’elle contient.

Le VIH, dont le matériel génétique est constitué d’ARN, peut, à l’aide de sa transcriptase inverse, s’introduire dans l’ADN de la cellule contaminée et en détourner le mécanisme pour sa propre réplication.

Toute modification dans une séquence d’ADN est une mutation. Dans le cas du VIH et plus généralement de tous les rétrovirus, la variabilité génétique est importante, car la copie d’un génome ARN n’est jamais fidèle. Certaines mutations n’ont aucun effet sur le virus, tandis que d’autres peuvent être létales. Dans le cas du VIH, la résistance à certains antiviraux est due à l’apparition de mutations. Elle impose un changement de traitement et peut aboutir à une impasse thérapeutique avec dégradation de l’état virologique, immunologique et clinique des personnes.

Des tests dits génotypiques ou phénotypiques permettent de mettre en évidence ces phénomènes de résistances et de déterminer quelles molécules ont le plus de chance d’être efficaces. Les tests de résistances sont réalisés en laboratoire, c’est ce qu’on appelle un génotypage. Pour identifier les génotypes et rechercher des mutations de résistance, on réalise un séquençage afin de déterminer l’ordre d’enchaînement des nucléotides (séquences) dans l’ARN et l’ADN et des acides aminés correspondants dans les protéines (trois nucléotides codent pour un acide aminé) par des techniques de biologie moléculaire.

Actualités

L’ANRS vient de communiquer les résultats de deux études qui, dans le domaine de la génétique appliquée au VIH, pourraient ouvrir de nouvelles voies de recherche.

Participant au programme de « recherche génomique » de l’Agence nationale de recherche sur le sida et les hépatites (ANRS), plusieurs équipes [1] ont pu identifier, par séquençage d’une partie du génome, trois régions impliquées dans le contrôle de la réplication du VIH et les conséquences dans la constitution du réservoir viral.

Les recherches n’ont pas été faites au hasard. Elles sont issues d’une part de la cohorte ANRS « CO 06 Primo » mise en place en novembre 1996 et qui compte plus de 600 participantEs entréEs 3 mois maximum après avoir été contaminéEs par le VIH et de l’étude physiopathologique EP 36 composée de personnes vivant avec le VIH depuis plus de 10 ans et qui, sans aucun traitement, contrôlent la maladie, c’est-à-dire avec une charge virale inférieure à 400 copies/mL. Ont été recherchés les liens entre les variations génétiques inter-individuelles décelées lors du séquençage et les quantités d’ARN viral plasmatique (permettant d’évaluer l’activité de réplication du VIH) et d’ADN viral présent dans les lymphocytes (quantité de virus stocké dans les CD4).

Le génome, ce territoire à découvrir

Trois régions du génome humain ont donc été identifiées. L’une est située sur le chromosome 6, et serait associée à un taux faible d’ARN viral chez les personnes en primo-infection, traduisant un bon contrôle de la réplication virale. Les deux autres régions découvertes sont situées sur les chromosomes 8 et 17 et seraient associées à un taux d’ADN viral bas (donc à un réservoir intracellulaire qui se constitue lentement).

La plate forme de génotypage à haut débit installée depuis peu à la Faculté de médecine Paris VI à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière permet maintenant un accès à des centaines de milliers de séquences du génome d’un grand nombre de personnes. Auparavant, on devait se contenter de voir si un « gène candidat » avait une influence possible dans une pathologie donnée. Par exemple, il a été montré qu’un gène codant pour un récepteur au virus à la surface des CD4, CCR5, peut être associé au fait de ralentir l’évolution de l’infection par le VIH. Cette découverte est importante. La pénétration du VIH à l’intérieur de la cellule nécessite une étape qui est la reconnaissance par l’enveloppe virale (GP 120) de molécules de surface cellulaire appelées récepteurs et co-récepteurs. Leur fonction habituelle est de reconnaître des substances solubles connues sous le nom de chémokines (substances chimio-attractantes). Le récepteur ayant la plus haute affinité pour le VIH est la molécule CD4. Un co-récepteur est nécessaire à la pénétration du virus, ce peut être soit la molécule CXCR4 ou fusine, reconnue seulement par les VIH-1 qui se répliquent dans les lignées de cellules T en induisant une fusion cellulaire (virus inducteurs de syncitium ou SI), soit une autre molécule nommée CCR5, exprimée surtout par les lymphocytes T mémoires et les macrophages, utilisée par les VIH-1 lymphotropes et aussi par les virus monocytotropes Non Inducteurs de syncitium (NSI).

A retenir

Grâce à cette plateforme de génotypage, on devrait pouvoir identifier les gènes présents dans les chromosomes cités plus haut et peut-être mieux comprendre les mécanismes de progression de la maladie, et poursuivre les recherches pour élargir la palette des armes thérapeutiques ou vaccinales contre ce virus.


[1Faculté de Médecine, Paris Sud, CHU Pitié-Salpêtrière, Necker, Kremlin-Bicêtre, Hôpital Paul Brousse, INSERM les unités 882, 802 et 543.