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Rapport Delfraissy

Quand les recommandations thérapeutiques deviennent des outils politiques

dimanche 20 octobre 2002

Il y a des années que nous savons qu’avoir une connaissance pointue de certains aspects de l’épidémie est essentiel à la prise en charge des malades et que les médecins plus académiques n’ont pas forcément. Avec la création de groupes spécifiques (femmes, assistance médicale à la procréation, prévention et sexualité, migrants, précaires, milieu carcéral) c’est l’expertise associative qui fait une entrée en masse dans les recommandations de prise en charge.

Ce rapport intitulé “ prise en charge des personnes infectées par le VIH ” et plus simplement surnommé “ rapport Delfraissy ” est à la fois une base de travail pour les services de santé et pour les associations d’aide aux malades. C’est aussi une base de revendication pour les associations face aux pouvoirs publics, comme pour les malades face à leurs médecins. Enfin, c’est un ouvrage fondamental et temporaire, véritable diagnostic à un temps donné de la prise en charge des malades, de ce qu’elle est et de ce qu’elle devrait être.

une base

Les recommandations des différents groupes d’experts abordent les cas particuliers parce que chaque malade a une histoire et une vie en dehors du service de consultation. Dans chaque chapitre, le rapport brosse un tableau du contexte, pose des définitions, résume les situations. Ensuite il aborde les moyens d’établir des diagnostics pour les médecins, les points particuliers à vérifier, les précautions à prendre. Puis viennent les recommandations de prise en charge, avec les points forts, les efforts à fournir pour parvenir à un niveau de soin acceptable.

revendications

En tant que rapport officiel, les recommandations 2002 sont un véritable outils pour améliorer quantité de choses : le fait qu’une intervention réparatrice en cas d’atrophie graisseuse du visage pour les patients qui le souhaitent doit être proposée, par exemple, est un élément supplémentaire pour exiger une vraie prise en charge de ces effets secondaires.

Le sida est une maladie sociale, c’est une banalité, mais les recommandations de cette année en tiennent compte. Pour les migrants et les précaires par exemple, les recommandations sont sans ambiguïté : “ appliquer la loi rapidement et sans restriction, afin qu’aucune personne migrante/étrangère vivant avec le VIH ne soit maintenue dans une situation administrative en deçà de la situation sociale prévue pour les personnes malades, c’est à dire qu’elle obtienne une carte de séjour temporaire avec autorisation de travail ”. Ou encore. “ Clarifier et aménager les procédures au sein des COTOREP ”. Et enfin des vérités souvent gardées sous silence sur le milieu carcéral sont dites : “ Il existe par ailleurs une vie sexuelle en prison ”, “ les patients séropositifs pour le VIH doivent recevoir en milieu carcéral une prise en charge médicale et thérapeutique équivalente à celle proposée en milieu ouvert. ” A quand une vraie prévention dans les prisons ? A quand une égalité de soins ? Les politiques ont beaucoup de pain sur la planche, mais les associations vont certainement les aider à tenir le couteau...

le petit livre jaune

Le rapport Delfraissy est aussi une véritable source d’information. Même si les recommandations ne prennent pas en compte les essais thérapeutiques en cours, les dernières actualités médicales et scientifiques sont prises en compte. Par ailleurs le simple rappel des bonnes pratiques de soin est importante pour les personnes qui découvrent leur infection, les nouveaux séropositifs, les malades qui décident de prendre leur maladie en main. Ce rappel est parfois important également pour des médecins qui auraient tendance à trop banaliser l’épidémie. En matière de prévention, certaines évidences sont répétées et cela fait du bien : “ le discours de prévention doit être simple : seuls les préservatifs, qu’ils soient “ masculins ” ou “ féminins ”, protègent du VIH et des principales IST ”. “ L’usage du préservatif est le seul moyen efficace de lutter contre la contamination par voie orale ”. Ce rapport se veut le meilleur possible, le plus complet. Il est encore améliorable dans son contenu, mais c’est déjà un bel effort, que nous saluons. On peut aussi regretter que la dernière version disponible sur Internet date de 1999.

acquisition

Vous êtes intéressés par l’information médicale et par le VIH puisque vous lisez ce bulletin. Le rapport est une des sources d’information de référence à votre disposition. Lisez-le, vous apprendrez forcément beaucoup sur votre maladie et sa prise en charge. Souvenez-vous, Information = Pouvoir.

Références : Rapport 2002, sous la direction du Professeur JF Delfraissy “ Prise en charge des personnes infectées par le VIH, Collection Médecine-Sciences des Éditions Flammarion, disponible auprès du Ministère de la Santé, de la Famille et des Personnes Handicapées.