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Et toujours

Patchwork 2

mardi 11 juillet 2006

Le Dr. Brigitte Milpied-Homsi, investigatrice principale de cet essai nous a donné les résultats de la première étude multicentrique portant sur des tests cutanés médicamenteux dans l’exploration des toxidermies aux antirétroviraux chez les personnes vivant avec le VIH, essai présenté dans Protocoles n°32.

L’essai devait recruter 50 séropositifs présentant des antécédents d’éruptions cutanées, imputables selon le clinicien, aux antirétroviraux prescrits (groupe I). Ce bras devait être comparé à 100 malades traités depuis au moins 6 mois et n’ayant présenté aucun signe d’effet secondaire cutané lié aux médicaments (groupe II). La technique consistait à poser sur le dos du malade un patch de la molécule testée (antirétroviral dilué à 30 %) et un patch placebo de vaseline afin de vérifier si le fait d’avoir déjà eu des antécédents de toxidermie rendait les personnes plus sensibles à de possibles réactions cutanées. Le recrutement a été très difficile ; 37 inclusions dans le groupe I, 47 dans le groupe II, sur 11 sites, sans doute parce qu’un essai financé ni par l’ANRS ni par les laboratoires, ne provoque pas de grande motivation des équipes de recherche. La seconde raison tient à la coordination des différents services : c’est l’infectiologue qui procédait au recrutement, la pharmacie hospitalière se chargeant de préparer le patch sur les conseils et les recommandations du dermatologue. Ajoutez à cela l’AFSSaPS qui trouvait la démarche de préparation pharmaceutique trop artisanale et on obtient 6 mois de retard pour les premières inclusions.

Quels sont les résultats de cet essai ?

Un quart des participants était des femmes et l’âge moyen était de 45 ans. Dans le groupe I, 22 % des participants ont réagi aux patchs, contre 4 % dans le groupe témoin. Il n’y a pas de différence significative dans les 2 groupes que ce soit des personnes asymptomatiques ou celles qui sont déjà avancées dans la maladie (stade sida). L’état d’avancement de la maladie n’a donc pas d’influence sur une possible toxidermie.
Il n’y a pas eu d’incidence ni de la charge virale, ni du taux de CD4 sur la survenue de toxidermie. D’autres études ont cependant démontré le lien entre la névirapine et la survenue de rash cutané. Les facteurs favorisant cette incidence sont le fait d’être une femme et celui d’avoir un niveau de CD4 supérieur à 350/mm3.

Par ailleurs, les toxidermies développées dans Patchwork 2 sont de types exanthèmes maculo-papuleux, caractérisé par des éruptions cutanées créant des rougeurs. Elles furent sévères, graduées en stade 3 et 4 et sont survenues 20 jours après le début du traitement sur une durée moyenne de 15 jours. Elles ont régressé à l’arrêt du traitement. Les 3 principaux médicaments jugés responsables de toxidermies dans l’essai sont la névirapine (Viramune®), l’abacavir (Ziagen®) et l’efavirenz (Sustiva®).
Seuls les malades ayant déjà été victimes de toxidermies antérieures se sont révélés sensibles aux patchs. Les 161 tests pratiqués chez les 47 participants du bras témoin, n’ont démontré aucun développement d’éruption cutanée. Autrement dit, seules les personnes préalablement fragilisées par des problèmes cutanés antérieurs sont susceptibles de récidives.

Les résultats permettent de conclure que ces tests sont utiles en cas de positivité, c’est-à-dire si un patch à la Viramune® se révèle positif, inutile d’en prescrire, il existe un risque de développer une allergie cutanée. A l’inverse, la faiblesse des résultats en terme de réponse, oblige à préciser qu’en l’absence de réaction, on ne peut rien en conclure. La sensibilité du test est donc un peu faible, mais les résultats en cas de réponse positive sont excellents en fiabilité.

Par ailleurs, Patchwork 2 cherchait également à vérifier l’existence de facteurs génétiques prédisposant à des éruptions cutanées. Sur 81 tests génétiques pratiqués, 9 se sont révélés positifs au marqueur B 57-01* : 7 malades dans le groupe I (20,6 %) et 2 malades dans le groupe II (4,3 %). Pour les participants qui ont présenté des toxidermies et qui prenaient de l’abacavir, l’utilisation des patch cutanés a pu démontrer l’imputabilité de cette molécule. Cependant, les deux malades du bras témoin n’avaient jamais reçu cette molécule.

La conclusion de l’essai montre une sensibilité des résultats inférieurs à l’étude Patchwork 1 qui avait pour but de tester la méthode de ces patchs allergisant pour les antirétroviraux mais qui en l’absence de bras témoin avait réduit les possibilités d’interprétation. Les résultats de Patchwork 2 se révèlent variables selon les antirétroviraux. Selon Brigitte Milped-Homsi, les résultats ne sont pas meilleurs car la méthode de patch n’est pas standardisée et reste, par la méthode de dilution de la concentration du médicament, artisanale.

Il est à noter qu’aucun malade n’a déclenché de réaction généralisée suite à la pause de patch (d’une taille moyenne d’un centimètre). La tolérance à la méthode est donc excellente et l’expérience pourrait se développer en cas de doute sur l’allergie à une molécule.

Par ailleurs, les données génétiques étant incluses dans une DNAthèque, il n’est pas impossible de voir émerger dans quelques mois d’autres liens génétiques avec d’autres molécules pour les rashs cutanés ou autres problématiques étudiées.

Dernier élément, le laboratoire GlaxoSmithKline va lancer prochainement un essai international, « Predict 1 », sur la prévention de l’intolérance à l’abacavir. Cet essai va utiliser le même profil que Patchwork 2, à savoir des tests cutanés. Une autre étude internationale est prévue sur les marqueurs génétiques. Nous vous tiendrons informés.


Des réactions d’hypersensibilité à un médicament anti-VIH, l’abacavir, se produisent chez 5% des patients, après deux semaines de médication. Depuis un certain temps on pensait qu’un facteur génétique pourrait être à l’oeuvre . Ceci paraît maintenant certain avec la découverte d’un gène particulier, le gène HLA-B5701, présent chez les personnes sensibles. On ignore encore si ce gène agit seul ou en association avec d’autres restant à découvrir. Quoiqu’il en soit, il est donc, d’ores et déjà, possible, avant de commencer à administrer l’abacavir, de tester les patients pour la présence ou non de HLA-B5701 et, éventuellement, de prescrire un autre antiviral.