Accueil > Traitements Recherche > Charge virale et CD4 La garantie d’une bonne santé ?

témoignage

Charge virale et CD4 La garantie d’une bonne santé ?

jeudi 11 avril 2013

Fred a bientôt 15 ans de séropositivité : virémie contrôlée et immunité préservée, sa santé n’est pourtant pas toute rose.

Tout a commencé en 1999 par un appel téléphonique au cours duquel un médecin lui apprît qu’il était séropositif. Il a ensuite tenu de 2000 à 2007 la permanence Droits sociaux d’Act Up-Paris. Avec une charge virale indétectable et un bon taux de CD4, il nous raconte son parcours thérapeutique et les questions qui se posent à lui aujourd’hui.

Fred : J’ai commencé à prendre un traitement en 2002, avec Trizivir®. C’était alors un nouveau traitement ; donc un traitement miracle... Seulement au moment où je commence à le prendre, je commence à avoir le sommeil léger et d’après mon copain je suis à fleur de peau. En 2005, je fais un échappement thérapeutique et je dois changer de traitement. »

Véronique : Quel traitement prends-tu alors ?

Fred : Truvada® Reyataz® et Norvir®. Mais je ne supporte pas le Norvir®, une sensation de mal être, mon médecin décide donc d’augmenter les doses de Reyataz® et supprime le Norvir®. Par ailleurs, je commence aussi à avoir des problèmes de vue. La télévision se trouble. Je me retrouve à porter des lunettes et les médecins me disent que ça n’a rien à voir avec le traitement (je prendrai ce traitement jusqu’en 2009, mon taux de CD4 est bon et ma charge virale indétectable). Mais en 2007 je commence à ressentir une fatigue plus pesante. je me souviens que les parmanneces Droits sociaux devenaient de plus en plus lourdes et recevoir vingt-cinq personnes dans l’après-midi de plus en plus compliqué. Alors j’arrête de tenir la permanence.
Et après ça empire ; je me rends compte que ce que je fais pour le COREVIH Ile de France sud depuis la maison me fatigue aussi... Jusqu’au jour où, alors que j’étais en train de lire Harry Potter, arrivé à la fin d’une page je ne me souvenais plus de ce que j’avais lu en haut de la page.

Véronique : Et alors, qu’est-ce que tu as fait ?

Fred : Je vais voir mon médecin qui me prescrit un rendez-vous avec un neuriologue spécialiste des problèmes chez les personnes séropositives. Il me fait faire des tests, diagnostique un problème de mémoire immédiate et me propose une ponction lombaire ou de changer de traitement. Je choisis de changer de traitement en étant quand même un peu inquiet puisqu’avec Truvada® et Reyataz® ça fonctionnait bien sur le plan viral et immunologique. Je retourne voir mon médecin de suivi VIH pour choisir un nouveau traitement. On remplace Reyataz® par Kivexa® et environ trois mois après, Truvada® par Viramune®. A peu près au même moment, il s’avère qu’un test de densitométrie osseuse révèle que je fais de l’ostéoporose. Mais là encore, ça n’aurait rien à voir avec les traitements. Le changement se passe bien, je reste en charge virale indétectable et mes CD4 sont toujours OK. Les effets indésirables baissent : je n’ai plus de blancs intellectuels même si je reste fatigué de façon chronique ; et en 2010 on s’aperçoit que l’ostéoporose a un peu reculé.

Véronique : Comme quoi elle devait bien avoir quelque chose à voir avec le traitement précédent. Donc ça va mieux !

Fred : Oui. Mais je dois faire un nouveau bilan cette année, j’espère ne pas avoir une mauvaise surprise car depuis le début de l’année dernière, ma tension a commencé à devenir trop élevée. Mon médecin VIH m’a donc prescrit un rendez-vous à l’hôpital Saint- Antoine à Paris pour comprendre d’où cela pouvait venir. Trois semaines après, je n’avais pas de réponse de l’hôpital, alors je les appelle. Ils m’expliquent qu’ils ont perdu l’ordonnance mais que toute façon le rendez-vous ne sera pas pour tout de suite car il y a beaucoup de monde. Mon médecin leur faxe à nouveau la demande de rendez-vous. Nous sommes mi-mai. cet été là, je pars en vacances à l’étranger, je me sens assez mal, avec des battements dans les oreilles, ma tension vraiment forte ; direction l’hôpital. Je n’ai pas dit que je prenais des antirétroviraux pour ne pas avoir d’ennui parce que c’était dans un pays pas forcément séropo-friendly. Puis ça continue à trainer du côté de Saint Antoine ; et fin novembre on me dit que le rendez-vous sera le 21 décembre. Ce n’est pas possible puisqu’à cette date je dois être en famille comme beaucoup. On me répond qu’alors ça ne sera pas avant avril et que "tout le monde décommande". Je leur dit que ça fait alors presque un an qu’ils ont perdu la première demande de rendez-vous.
J’ai finalement eu un rendez-vous le 25 janvier de cette année. J’ai passé toute la journée en hôpital de jour pour faire tous les examens. À la fin de la matinee, la cardiologue que j’ai vu 10 minutes me prescrit de l’Amlor® 5mg, deux analyses complémentaires (aldostérone et rénine) et une radio surrénale à cause d’une suspicion de cancer. Je pensai avoir un suivi comme avec mon infectiologue, il n’en sera rien. Il faut comprendre que pour nous, séropos, ajouter un traitement quel qu’il soit c’est difficile a intégrer au quotidien. Ce voir prescrire un nouveau traitement sans explications, sans suivi, sans rapport complet n’inspire pas confiance. Démarrer un traitement pour l’hypertension n’a rien d’anodin.
l’étape suivante n’est pas anodine non plus car il faudra que mon infectiologue s’acharne pour obtenir les résultats des examens fait à Saint-Antoine, et une fois obtenus on s’apercevra qu’ils ne sont pas complets ! Comme ma tension restait élevée on est passer à Amlor® 10mg. Avec une tension variant de 17 a 21 sous Amlor® 10mg mon infectiologue contactera Saint Antoine qui me fixera finalement un rendez-vous pour le 9 avril. Aurai-je finalement le rapport complet ? J’ai décidé de à ne pas attendre un mois supplémentaire et j’ai finalement pris rendez- vous dans un cabinet de cardiologie en ville. Nouveau bilan en cours prise de sang, doppler des reins, etc, et arrêt de l’Amlor® par le cardiologue en attendant les résultats des examens complémentaires. Seulement, il faut pouvoir avancer 80 euros pour la consultation ; heureusement que j’ai une bonne mutuelle.

Véronique : Donc au niveau neurocognitif ça va mieux mais tu as un nouveau problème ?

Fred : Ça va vraiment mieux ; je peux lire à nouveau, avoir une conversation soutenue mais je fatigue quand même assez vite. Je m’en suis rendu compte quand je suis allé à Disneyland ; j’ai fini sur les rotules et il m’aura fallu 2 jours pour récupérer.
Mon ostéoporose à l’air de se résorber aussi mais je suis furieux contre l’hôpial Saint-Antoine. De la prise de rendez-vous jusqu’à l’analyse des résultats, ça a été très compliqué ; par moments j’ai du menacer d’alerter la direction de l’hôpital pour accélérer les choses. Ce n’est pas normal. C’est suite à ce genre de fautes que Gérald s’était résigné à aller dans le privé, avec du coup des mois de retards sur son opération. C’est peut-être pour ça qu’il est mort. On ne m’a toujours pas expliqué d’où viennent mes problèmes cardiaques. Peut-être de l’abacavir ? Les médecins me disent que non. De l’aldostérone qui est trop basse, pourquoi pas. Mais pourquoi elle est trop basse ?

pour aller plus loin

Les troubles de la vision sont un effet indésirable connu de Reyataz® ; voir le tableau des ARV page 28 de ce numéro.

Truvada® contient du ténofovir ; or il est prouvé que le ténofovir est l’inhibiteur nucléosidique de transcriptase inverse (INTI) qui a le plus d’impact sur la densité minérale osseuse que d’autres INTI. Parallèlement à l’augmentation de l’utilisation du ténofovir, le risque de fractures parmi les séropositifs a augmenté. L’équipe de la FHDH a en projet d’étudier la corrélation possible entre ces deux augmentations, bien qu’elles ne soient heureusement pas dans les mêmes proportions.
Une polémique importante a eu lieu sur les risques cardiovasculaires liés à l’abacavir (contenu dans Ziagen®, Trizivir® et Kivexa®). Depuis 2009 cette polémique s’est calmée après la CROI alors que les conclusions des études n’étaient pas claires. Par la suite des résultats contradictoires ont continué d’être rendus publics. Des publications ont récemment paru sur ce sujet ; cela devrait nous permettre de faire le point dans un prochain numéro de Protocoles. Nous rappelons tout de même qu’avant d’initier un traitement par abacavir, il faut faire un dépistage de l’allèle HLA-B*5701 puisque l’abacavir est contre-indiqué pour les porteurs de cet allèle.