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Attention recrudescence de VHA

jeudi 31 juillet 2008

Fin juin, l’Institut national de Veille Sanitaire (InVS) lançait une alerte sur la recrudescence d’hépatites A chez des hommes ayant eu des rapports homosexuels. Des moyens de prévention existent. C’est donc l’occasion de faire le point des connaissances.

Le virus de l’hépatite A (VHA) se transmet par voie orale. Résistant dans le milieu extérieur, on le retrouve dans : les fruits de mer, l’eau de baignade, l’eau d’irrigation, les eaux usées, mais aussi dans les exréments. La promiscuité et les mauvaises conditions d’hygiène augmentent donc le risque de contamination. Son cycle de réplication fait qu’on peut le retrouver longtemps dans les selles : ingestion d’aliments contaminés ; absorption par l’estomac et l’intestin grêle ; réplication dans le foie ; sécrétion dans la bile, réabsorption ; excrétion dans les selles (Le virus n’est pas excrété dans les urines.). Ce qui explique l’excrétion prolongée du virus.

Les facteurs de risque

L’hépatite A n’est pas une infection sexuellement transmissible, mais elle peut se transmettre à l’occasion de rapports sexuels, ou plus précisément par voie oro-fécale. Il existe aussi une faible transmission par voie intraveineuse (usage de drogues avec partage de matériel ou piqûre accidentelle par une aiguille contaminée). Pour que le virus passe d’une personne à l’autre, il faut qu’il y ait un contact entre les selles contaminées et la bouche, et plus largement entre l’anus de l’un et la bouche de l’autre.

Le risque d’infection par le VHA concerne : les professionnels de la santé, les toxicomanes, les vendeurs de produits alimentaires, les égoutiers, les voyageurs vers les pays de forte endémie, les pensionnaires et personnels des établissements psychiatriques, des centres pénitentiaires, des crèches, des centres de soins et toutes personnes, hommes ou femmes, homosexuels ou hétérosexuels, pratiquant l’anulingus.

Chez la plupart des personnes, l’hépatite A ne provoque pas forcément de symptômes, et peut même guérir après quelques semaines. Mais pour une minorité (0,01 % selon les estimations), l’infection peut avoir une évolution plus grave, et provoquer une hépatite dite fulminante (destruction du foie) à issue fatale, que seule une greffe du foie en urgence peut éviter. Le risque et la fréquence d’une hépatite A fulminante sont augmentés chez les personnes souffrant d’une autre hépatite virale (VHB ou VHC), ou séropositives au VIH.

Les moyens de prévention

Il existe des moyens de prévention simples, comme se laver les mains après avoir été aux toilettes, avant de manger ou de cuisiner. Lors de rapports sexuels, l’utilisation des moyens de prévention (préservatifs, digues dentaires) doivent être distincts pour la fellation et la pénétration, et « faire écran » entre la bouche et l’anus ou la marge anale. Le fait de se laver les mains et les parties ano-génitales en contact avec la bouche est aussi recommandé.

Que penser de la vaccination ?

Enfin il existe un vaccin qui protège 90 % des personnes contre la contamination au VHA. Il est préparé à partir de virus inactivés et consiste en deux injections réalisées entre 6 et 12 mois d’écart. La protection contre la maladie est effective 20 jours après la première injection.

Chez la plupart des personnes vivant avec le VIH, le vaccin contre l’hépatite A s’avère sûr et efficace. C’est ce qui ressort d’une étude américaine récente. Si la réponse immunitaire des personnes séropositives est plus faible que celle des personnes non-infectées, la sécurité et l’immunogénicité de deux doses du vaccin inactivé sont bonnes. L’essai a porté sur 133 personnes séropositives au VIH et séronégatives au VHA, réparties en deux groupes : vaccin versus placebo. Les résultats en termes de fréquence et de niveau des effets indésirables sont comparables entre les deux groupes. En terme d’efficacité, les résultats montrent une séroconversion (ici production d’une réponse immune (anticorps) suite à la vaccination) d’environ 50 % un peu plus d’un mois après la seconde dose. Ce taux atteint 75 % chez les personnes ayant plus de 500 CD4/mL.

Certaines études suggèrent que les vaccins, comme celui contre la grippe, peuvent transitoirement accélérer la réplication du VIH, mais le vaccin contre l’hépatite A est indiqué aux personnes amenées à être confrontées au VHA. Les deux doses prévues sont alors recommandées et nécessaires, même si elles ne garantissent pas une protection à 100 %, une seule dose n’étant pas assurément suffisante pour prévenir l’hépatite A.

A ce jour, la vaccination contre l’hépatite A est recommandée : aux personnes atteintes d’une autre hépatite (B ou C) ou d’une autre maladie chronique atteignant le foie ; aux personnes atteintes par le VIH ; aux usagers de drogues par voie intra-veineuse ; aux homosexuels masculins ; aux personnes non immunisées amenées à voyager dans des pays d’endémie d’hépatite A ; aux personnes vivant dans des conditions précaires ; aux personnes travaillant dans des collectivités accueillant des jeunes enfants ou exposées professionnellement ; aux personnes ayant dans leur entourage une personne ayant une hépatite A aiguë.

Si on veut parler d’économies de la santé...

Le vaccin coûte près de 50 E et n’est pas remboursé par la Sécurité sociale malgré les revendications répétées des associations membres du Collectif Hépatites Virales (CHV) [1]. Les autorités de santé doivent prendre leurs responsabilités face à cette recrudescence d’hépatites A. Une campagne d’information plus large est nécessaire, notamment dirigée vers les homosexuels, dont les premiers cas indiquent qu’ils sont en première ligne de la recrudescence de cas d’hépatite A à Paris. Enfin, le vaccin doit être remboursé avant qu’une épidémie plus importante n’éclate. A quand une campagne de vaccination gratuite contre les hépatites A et B dans tous les saunas gays ?
A retenir

Une recrudescence de cas d’hépatite A dans la communauté gay doit inciter à une plus grande prudence en termes de pratiques sexuelles protégées. Le virus de l’hépatite A est le plus souvent anodin mais peut s’avérer dangereux dans 0,01 %. Des moyens de prévention existe, notamment un vaccin. Deux doses sont nécessaires pour obtenir une immunité efficace (90 %). Ce vaccin est recommandé aux personnes vivant avec le VIH, si elles présentent des risques d’être exposées au VHA.


[1Le CHV regroupe 11 associations : Actif Santé, Actions-Traitements, Act Up-Paris, Aides, Arcat, Asud, Association Française des Hémophiles, Nova Dona, Sida Info Service/Hépatites Info Service, SOS Hépatites et Transhépate.