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communiqué de presse
Afrique du Sud : Pfizer doit céder face aux malades
lundi 13 mars 2000
Aujourd’hui, 13 mars 2000, Treatment Action Campaign (TAC), une coalition de malades du sida sud africains, demande officiellement à Pfizer de réduire drastiquement le prix de son médicament, le fluconazole, ou de lui octroyer une licence volontaire afin d’en produire à moindre coût une version générique. En Afrique du Sud près de 4,5 millions de personnes sont contaminées par le VIH. Près de 100 000 malades meurent chaque année.
Le fluconazole (Diflucan® ou Triflucan®) est un médicament utilisé communément pour traiter la méningite à cryptocoque, particulièrement répandue chez les malades du sida. En l’absence de traitement, la survie est de moins d’un mois (source ONUSIDA). « Le diagnostic est facile à réaliser. Cependant, le traitement [...] et la prophylaxie sont souvent impossibles dans les pays en développement du fait du coût élevé et de la disponibilité limitée du médicament. » (ONUSIDA, octobre 1998).
Actuellement, il n’y a pas de générique du fluconazole disponible en Afrique du Sud puisque, ce médicament étant toujours sous licence, Pfizer en détient le monopole. Le traitement quotidien de la méningite par fluconazole revient à environ 117 FF par malade.
Le coût annuel d’achat du médicament pour la prévention d’une méningite est lui d’au moins 20 000 ZAR, soit 21 670 FF (source MSF), par personne et par an - sans compter le coût de la prise en charge médicale. Ce prix est absolument hors de portée de la majorité des malades.
Cependant le coût réel du fluconazole est bien en deça des prix pratiqués par Pfizer. En Thaïlande et en Inde, des compagnies productrices de génériques vendent ce même médicament 10 ou 20 fois moins cher - Pfizer n’a pas obtenu de licence de production pour le fluconazole dans ces deux pays. A ces prix des milliers de patients pourraient être traités. Mais le fluconazole n’est qu’un exemple de l’utilisation abusive des licences par les compagnies pharmaceutiques.
Le débat autour des accords de l’OMC et des licences obligatoires qui agite l’opinion publique depuis plus d’un an a permis de mettre en évidence un certain nombre de faits :
– Jusqu’à présent les laboratoires et les gouvernements occidentaux étaient prêts à sacrifier la vie de millions de personnes au nom d’intérêts économiques. Les compagnies pharmaceutiques assisté par le gouvernement américain et l’Union européenne, malgré les déclarations publiques, font pression (désinformation, chantages, menaces de procès, pressions bilatérales, etc.) pour empêcher les pays de recourir aux dispositions légales prévues par les accords internationaux et maintenir le monopole des laboratoires occidentaux sur la production et la commercialisation des traitements. Les exemples se sont multipliés ces derniers mois : en Thaïlande, en Afrique du Sud, en République Dominicaine, au Brésil, en Philippines, etc. Le gouvernement américain n’hésite d’ailleurs pas à imposer aux pays en développement des exigences supérieures à celles qu’imposent les standards internationaux (accord TRIPS de l’OMC).
– La production locale (par licence volontaire, obligatoire ou en l’absence de licence) permet à certains pays ou regroupements de pays de produire à moindre coût et de faire jouer la concurrence avec les multinationales ; ce qui fait immanquablement baisser les prix comme on a encore pu l’observer avec le fluconazole en Thaïlande.
– Le prix des médicaments (antirétroviraux et autres traitements contre les maladies opportunistes particulièrement chers comme le fluconazole) sont vendus extraordinairement trop chers dans les pays en développement (ce que rien ne justifie) et rendent l’accès aux médicaments impossible dans des pays pauvres.
C’est pourquoi Act Up-Paris, exige :
– que les compagnies pharmaceutiques, en général, cessent leur pressions sur les pays pauvres et renoncent au maintien de politiques tarifaires meurtrières ;
– que Pfizer, réponde à la demande des malades sud-africains, et aligne ses prix de vente sur les prix des génériques les plus compétitifs actuellement (20 fois moins cher en Thaïlande) ou donne la possibilité à TAC de produire du fluconazole en générique dans les plus brefs délais.
L’action des TAC est soutenue par Act Up-Paris en France comme aux Etats Unis, ainsi que par MSF partout dans le monde.