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Sida is disco

février 2009

Chaque mercredi une poignée de militantEs d’Act Up tient une pemanence des droits sociaux (PDS) et accueille les personnes embourbées dans des situations aberrantes. Cette rubrique a pour but de présenter un florilège de ces cas et des actions menées.

Y’a pas de petites économies !

Je suis séropositive depuis une vingtaine d’année, sous traitement depuis 17 ans, prise à 100 % par la Sécurité Sociale et bénéficiaire de l’AAH, ce qui me donne donc un revenu d’existence trop élevé aux yeux de la loi pour bénéficier de la CMU. Tout le monde sait que les traitements au long cours ne sont pas anodins et, bien qu’ils soient très efficaces sur le virus du sida, entraînent toutes sortes d’effets secondaires qui nécessitent une batterie d’examens souvent pratiqués à l’extérieur de l’hôpital public, dans des centres privés. Nous, malades, commençons à nous rendre compte des conséquences directes de la mise en place des franchises, conséquences catastrophiques sur notre porte-monnaie, et notre santé. Et pourtant, les franchises ne sont que l’apéritif de la destruction globale du système de santé que le gouvernement s’apprête à mettre en oeuvre.
L’exemple qui suit est véridique, il est tiré de mes dernières feuilles de remboursements. Lors de la visite bi-annuelle chez ma gynécologue à la Pitié Salpetrière, elle me trouve une anomalie nécessitant un examen supplémentaire ; rien d’inhabituel au vu des complications liées aux interactions entre les antirétroviraux et le système hormonal. Moins habituel, ma médecin décide que cet examen, le premier d’une longue série à faire de toute urgence, ne fait pas partie du 100 % et elle me donne ordonnance de prise en charge à 70 %. En effet, certainEs médecins ont décidé de faire faire des économies à la Sécurité Sociale et ne se demandent plus si leurs patientEs ont une mutuelle ou des revenus, tout en sachant qu’ une grande majorité des séropositifVEs vivent sous le seuil de pauvreté.
Je m’en vais donc dans un centre d’imageries médicales spécialisées privé car un rendez vous à l’hôpital demandait plusieurs mois d’attente. J’avance le règlement par chèque, 165 e, pensant être remboursée de 108 e malgré le parti pris de ma médecin. Le décompte mensuel, lui, fait ressortir que je dois de l’argent à la Sécurité Sociale, les fameuses franchises dont le total s’élève à 66 e, par addition de 1 e par-ci, 0,50 e par-là pour la pharmacie, 2 ou 3 e de temps en temps sur les actes de biologie… Résultat : je suis remboursée de 44 e alors que je suis censée être prise à 100 % et que je vis avec 650 e mensuels, j’ai dépensé 120 e de ma poche pour être bien soignée, alors que je n’en ai absolument pas les moyens.
Quand on l’habitude de vivre avec peu d’argent, on devient vite très débrouillard, et on sait que la première chose à ne jamais faire c’est d’aller dans un centre médical privé et avancer le règlement, car c’est le seul moyen qu’a l’état de récupérer ses franchises. La deuxième chose à faire quand on est séropositifVE est d’exiger de son médecin que tout acte médical soit pris à 100 %, car le corps est un tout et les conséquences des trithérapies sur des organes ou des parties du corps qui, a priori, n’ont rien à voir avec la formule sanguine sont réelles : même si on se casse une jambe cela peut être lié à la diminution de la densité osseuse entraînée par les médicaments.
L’empowerment, un des axes principaux des Principes de Denver, ne doit pas être oublié plus de vingt ans après les débuts des premiers Act Up. La prise en charge des malades et de leur destinée par elles et eux-même, reste aujourd’hui notre seule option pour résister aux attaques incessantes du gouvernement au démantèlement du système de santé.
Nous malades, sommes en colère ! Ou lorsque la loi oublie les patientEs…

La prise en charge médicale n’est plus c’qu’elle était

Avant même que l’Assemblée ait voté « pour » ou « contre » le nouveau projet de loi Hôpitaux, Patients, Santé, Territoires de Madame la Ministre de la Santé, les hôpitaux mettent en place les prémices de la dite loi. Nous, séropos commençons à en payer les frais. Au propre comme au figuré, les malades trinquent et ce n’est que le début. Par le passé, nous étions traitéEs aux petits oignons. Normal, nous étions destinéEs à disparaître. C’était l’hécatombe, les pontes de la médecine tentaient le tout pour le tout pour nous garder en vie. J’ai souvenir d’être resté presque une heure avec mon médecin d’alors, parce que je déprimais plutôt sec de voir mes camarades disparaîtrent, presque une heure, incroyable ! Et bien non, cela se passait comme ça avant. Aujourd’hui, le temps passé avec le médecin heurte le nouveau système de tarification de l’acte (T2A). Souvenez-vous, du temps où la relation soignantEs soignéEs était plus égalitaire. Les médecins, ne savaient pas. Nous, nous souffrions et le savions, nous n’avions pas grand chose pour nous sauver, juste de l’AZT au début. Nous avions alors, plus de temps pour dialoguer avec notre médecin, plus d’écoute de sa part. Ils et elles apprenaient de nous, ils et elles apprenaient par nous ; eux, cherchaient. Nous, nous étions les expertEs en matière d’effets secondaires à l’aune des thérapies contre le VIH. Aujourd’hui, combien de médecins nous examinent vraiment ? Combien d’entre nous vont tous les six mois, de l’autre côté de la ville, pour 10 minutes de consultation avec notre spécialiste VIH, qui trop souvent se solde par un simple renouvellement d’ordonnance. Plus de pesée, plus de palpation des ganglions, peu de prises de tension. Non, pour ça, on attend l’accident. Aujourd’hui, ils ne regardent plus que les chiffres de nos résultats entre T4 et T8.
Le 11 novembre j’ai fait, à 15 minutes d’intervalle, deux syncopes. Le lendemain, avec mon ami, nous nous précipitions auprès d’une médecin VIH que je rencontrais pour la première fois. Elle pris mon cas au sérieux et me prescrit d’urgence un IRM, un scanner ainsi qu’une batterie de test dont un holster ECG. Les rendez-vous sont pris par ses soins. Le holster ECG aura lieu le 29 janvier. D’urgence qu’elle avait dit ? Où est passé le temps où l’on m’aurait accompagné toutes sirènes hurlantes, pour faire ces examens. Ce n’était que deux syncopes ! Pas de quoi se mettre en frais ? Pas de quoi creuser le trou de la Sécurité Sociale, non mais des fois ! Combien d’entre nous, quand ils rataient un rendez-vous, avaient l’habitude d’être immédiatement appeléEs par le service qui venaient aux nouvelles ? Aujourd’hui, vous avez des maladies auto-immunes qui vous foutent en l’air ? Ben quoi, Monsieur X, il vous faut prévenir si vous ne venez pas ? Qu’importe si vous ne dormez plus, que vous ne pouviez plus vous déplacer car chaque mouvement de votre corps est une torture. Vous êtes malade, alors bougez vous, sinon, on vous laisse choir. Comme toutE malade qui flippe, j’ai appelé tous les hôpitaux parisiens pour trouver mon holster ECG. Et résultat, je n’avais rien. Voyez, il ne fallait pas s’affoler !
Combien d’entre nous reçoivent des factures indues lorsque, par peur, nous allons avec notre compagnEon du jour aux urgences, pour obtenir un traitement post-exposition ? Combien abandonnent les « traitements de confort » depuis que les franchises médicales ont réduit les remboursements ? Et par « traitements de confort », nous entendons bien sûr ceux qui atténuent les effets secondaires des traitements. Bien sûr ! Rien de plus ! Nous sommes en colère !