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Etats Généraux à Marseille

mardi 20 février 2007

Il y un an et demi, les premiers États Généraux « Femmes et sida » rassemblaient plus d’une centaine de femmes à Paris. Faisant suite à cette expérience riche et réclamée, les deuxièmes rencontres régionales Femmes et sida se sont déroulées le 25 novembre 2006 à Marseille.

Ces journées sont le fruit d’un travail interassociatif : le Mouvement Français pour le Planning Familial (MFPF), Sida Info Service (SIS) Sol en si, Aides et le Tipi. Il s’agissait d’une rencontre de femmes séropositives, en complément des Etats Généraux « Femmes et sida » de 2004 et 2005, créés par les associations SIS, Aides, Le Kiosque, le MFPF et Act Up-Paris. L’objectif était de faire avancer la question des femmes séropositives dans la société, leur place dans la recherche thérapeutique et le milieu médical. Cette année deux fois plus de femmes étaient présentes à Marseille, et le changement de ton était frappant. Si beaucoup d’entre elles n’ont toujours pas accès aux associations et vivent dans un isolement familial et géographique, aujourd’hui elles veulent en sortir. Le discours a été plus actif, elles ont manifesté une volonté de visibilité et le désir de s’engager.

Articulée autour de cinq ateliers le matin, la séance plénière l’après midi a vu la présentation des revendications qui en sont sorties.

L’atelier « vie active, désir et plaisir »

Il a permis de débattre sur les problèmes que rencontrent les femmes séropositives dans leur vie affective, notamment ceux liés à la sexualité et la libido. Ces questions appellent des réponses que seules des études plus pointues pourront apportées. Ces problèmes sont-ils normaux ? Est-ce dû à l’âge ? À la séropositivité ? Aux traitements ? Pourquoi ? Cet atelier était composé en grande majorité de femmes séropositives depuis au moins dix ans.
La nécessité de mener des études spécifiques sur les femmes a été rappelée à plusieurs reprises, sans oublier le fait de donner une place plus importante à la femme dans la recherche, à la prise en compte du corps, de ses désirs, de sa sexualité etc. Concernant la représentation de la femme séropositive, les femmes ont un rôle à jouer, elles doivent s’exposer et en parler. Ces moments de parole entre femmes et pour les femmes pourraient passer par un forum internet.

L’atelier « prendre soin de soi »

Il s’est penché sur les questions de santé et de bien être, sur la nécessité pour les femmes séropositives d’être plus actives dans leur parcours de soins et sur une meilleure prise en compte de la santé globale. L’importance de tenir compte du vieillissement, de l’alimentation, de l’envie de donner envie et de garder une estime de soi à émerger du groupe. Mais pour tout cela, la solidarité et les réseaux d’entre-aide sont importants.
Là aussi, le besoin de se mobiliser et de s’impliquer peut se faire soit en créant son propre mouvement, soit en s’emparant des structures déjà existantes. En parallèle, un travail de lobby doit être mené sur les médecins en rappelant encore et toujours que les femmes et les hommes peuvent réagir différemment face à la maladie .

L’atelier « dire sa séropositivité ? »

Cet atelier a affirmé la nécessité d’agir auprès des médias, des représentantEs politiques et religieuxSES pour changer l’image de la femme séropositive. Les participantes ont rappelé l’utilité d’intervenir auprès du personnel médical pour améliorer le moment de l’annonce de la séropositivité, tout en tenant compte de la confidentialité et des spécificités féminines. L’importance de cette problématique en lien avec les enfants, au sein des familles, peut se faire par le développement de groupes de paroles, des réseaux, etc. La mise en place d’une association nationale pourrait être une piste intéressante dans ce domaine. D’autant que la région PACA est la deuxième région en nombre de séropositifVEs et que les situations de précarité et d’isolement sont importantes, avec des fins de mois difficiles, dans des villages où ces personnes sont isolées. Et il faut penser aux autres régions où cette dynamique n’existe pas. Des formes de liens sont à inventer, surtout en termes de réseaux.

L’atelier « famille et VIH »

Il a mis l’accent sur le besoin d’un accompagnement et d’un soutien des familles dont unE ou plusieurs membres sont séropositifVEs car la solitude est flagrante particulièrement quand ces familles vivent dans des petites villes. C’est encore plus important pour les enfants dont les parents sont séropositifVEs car selon elles et eux, cet isolement va de pair avec la représentation péjorative des enseignantEs. A ce sujet, il est nécessaire d’améliorer leur formation, notamment sur des problèmes comme la confidentialité. Ces familles veulent arrêter de vivre dans le secret et affichent une volonté réelle de créer et/ou de faire partie d’une association.

L’atelier « travail et société »

Il a fait ressortir le manque d’information et les interventions toujours nécessaires auprès des employeurEs, des syndicats. Les séropositifVEs doivent absolument prendre la parole, d’abord pour se rendre visibles, pour mobiliser les associations sur ces revendications, pourquoi pas au sein d’un collectif, et pour demander la mise en place d’un accompagnement spécifique pour les séropositifVEs.

Visibilité

Il reste encore un énorme travail à faire autour de la représentation de la femme séropositive au niveau de la société, par l’intermédiaire des médias notamment. Beaucoup de femmes sont maintenant prêtes à prendre la parole, conscientes qu’il en va de leur responsabilité et que, tant qu’elles ne le feront pas, rien ne changera. Les femmes, qui sont le mieux placées pour parler de tout cela, se doivent de devenir plus militantes, si comme elles le disent, elles en ont assez d’être des victimes. Cette évolution passera d’abord par la lutte contre les discriminations.

Exprimée dans tous les ateliers, la revendication d’une vraie visibilité des femmes pourrait se concrétiser par la création d’un inter-associatif fort et visible. C’est en tout cas ce qui ressort dans la volonté exprimée de créer un espace de parole, un lieu d’échanges, d’informations sur internet et en inter-associatif. Un besoin de contact permanent pour avancer plus vite.

Enfin, du côté de la prise en charge médicale, plusieurs participantes ont rappelé l’importance d’être maîtreSSE de son parcours de soins, les femmes veulent que leur corps soit considéré dans sa globalité et que les médecins tiennent enfin compte des différences entre les hommes et les femmes. La place plus importante des femmes dans les essais est un facteur important car beaucoup de questions ne sont toujours pas soulevées. Il n’est pas question de dire que cette maladie est plus grave pour les femmes que pour les hommes, du moins en ce qui concerne l’aspect médical et la recherche thérapeutique, mais de dire qu’elle est différente. Beaucoup de représentantEs politiques, ou de médecins ne l’ont même pas soupçonné et ne veulent toujours pas le voir. C’est donc à nous, femmes séropositives, de le dire encore et encore, de ne plus en parler qu’entre nous mais d’agir et de se battre. Actrices de notre santé, c’est par notre mobilisation que nous ferons évoluer les choses.