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Les putes ne sont pas des femmes ?

jeudi 3 novembre 2011

Samedi 5 novembre 2011 se tiendra la « Manifestation nationale contre les violences faites aux femmes » à l’appel du Collectif National pour les Droits des Femmes (CNDF). Une dizaine de revendications sont posées, toutes plus louables les unes que les autres : mise en place de politiques spécifiques pour les femmes en danger, redéfinition du harcèlement sexuel, mise en place d’un Observatoire National des violences, etc.

Sur la question du travail du sexe et de la prostitution, le CNDF exige « la mise en œuvre d’une politique de pénalisation du client de la prostitution »

Si, sur la forme, cette mesure fait figure de détail, elle est au contraire d’une importance capitale.
Nous n’avons eu de cesse, aux côtés de l’ensemble des associations de santé et de lutte contre le VIH/sida (UNALS, Médecins du Monde, Aides, Elus Locaux Contre le Sida, Arcat, etc.), de dénoncer l’actuelle volonté politique de légiférer dans le sens de la pénalisation des clientEs des prostituéEs.

Comme le délit de racolage passif, cette mesure va exposer davantage les travailleuRses du sexe aux violences, les éloigner encore un peu plus des dispositifs de prévention.
Loin d’enrayer les trafics et les réseaux de traite, un tel dispositif accroîtrait leurs pouvoirs : quand les putes ne peuvent plus exercer à l’extérieur parce que le client est devenu un délinquant, ce sont les mafia qui leur fournissent des appartements, quand les putes doivent se cacher, l’isolement et donc l’insécurité augmentent, c’est pour ces raisons que des proxénètes leur offrent leur « protection ».

Tous ces arguments ont été exprimés, lors des Assises de la Prostitution, lors de conférences de presse, mais cette parole ne bénéficie malheureusement pas de la même couverture médiatique que celle du CNDF. Les travailleuRses du sexe, les prostituéEs, ne sont pas écoutéEs.

Act Up-Paris, par voie de courrier, mail et fax, a alerté, le 24 octobre dernier, l’ensemble des signataires de l’appel sur ces différents points. A ce jour, nous n’avons reçu aucune réponse.
Nous leur suggérions pourtant d’opter pour un compromis : maintenir sa signature et faire parallèlement une déclaration publique pour exprimer son opposition à la pénalisation des clients des prostituéEs.

Qu’est-ce à dire ? Que parce que la majorité des mesures exigées dans cet appel sont nécessaires, il n’est pas si grave d’en cautionner une qui, si elle voit le jour, s’avérera meurtrière ? C’est donc au sacrifice de la lutte des prostituéEs et travailleuRses du sexe qu’un cadre unitaire doit être maintenu ?
Ou peut-être que pour les signataires de cet appel, qui gardent aujourd’hui le silence, les putes ne sont pas des femmes ?

Prétendre lutter contre les violences faites aux femmes tout en apportant sa caution à la pénalisation des clients des prostituéEs, qui aura l’effet exactement inverse est incompréhensible, le faire en connaissance de cause, c’est criminel.

Act Up-Paris exige que les signataires de l’appel du CNDF [1] prennent une position ferme et précise sur la « pénalisation des clientEs de la prostitution ».


Mise à jour, 4 novembre 2011 : entre temps, Europe Ecologie Les Verts nous signale avoir informé le CNDF que la question de la pénalisation des clientEs n’était pas encore tranché en interne, et qu’ils s’opposaient à toute forme de répression des prostituéEs. Leur courrier joint.

Mise à jour du 5 novembre 2011 : le Planning Familial nous envoie un mail dans lequel il réaffirme son opposition à la pénalisation des clients de prostituéEs (voir document joint) : "Le Planning Familial s’oppose à la pénalisation des clients comme aux autres mesures répressives qui pénalisent les personnes prostituées. Cette prise de position (ci jointe) a été votée lors de son CA. Malgré notre désaccord sur ce point, nous avons quand même appelé à la manifestation compte tenu d’autres revendications que nous partageons"


[1Collectif national pour les Droits des Femmes, Actit-Union des Femmes Socialistes, Agir contre le chômage, les Alternatifs,Alternative Libertaire, ANEF, Apel-Egalité, Association des communistes unitaires, Association Groupe Cadre de Vie, Association pour les Droits des Femmes du 20è,Atalante vidéo, Attac, CADAC, Centre LGBT Paris Ile de France, CGT, Les Chiennes de garde, Collectif féministe Handicap, Sexualité, Dignité, Collectif féministe contre le Viol, Collectif Féministe « Ruptures » et Réseau Féministe « Ruptures », Collectif féminin masculin de Vitry, Collectif mixité CGT des Bouches du Rhône, Collectif région parisienne pour les Droits des Femmes, Comité de vigilance et de suivi pour l’application de la loi du 9 juillet 2010, Commission nationale Droits des Femmes du Parti socialiste, Coordination lesbienne de France, DECIL : Démocratie et Citoyenneté Locale (Mantes la Jolie), Du Côté Des Femmes (Cergy), FASTI, Elu-e-s contre les Violences faites aux Femmes, Europe Ecologie Les Verts, « Femmes libres » Radio Libertaire, Fédération nationale Solidarité femmes, Femmes solidaires, FIT, une femme, un toit, FSU, Garçes (groupe d’action et de réflexion contre l’environnement sexiste, Sciences po Paris), Gauche unitaire, Initiative des Femmes Kurdes en France, Initiative Féministe Européenne France,Intersyndicale CFDT-CGT SDFE, Lesbiennes of Color, Ligue des Droits de l’Homme, Ligue des Femmes Iraniennes pour la Démocratie, Maison des Femmes de Montreuil, Marche mondiale des Femmes, MJCF, Mouvement Jeunes Femmes, NPA, Osez le féminisme,Paroles de femmes, Parti Communiste Français, Parti de Gauche, Planning Familial, RAJFIRE, SOS sexisme, Stop Précarité, UNEF, Union syndicale Solidaires.