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Banque Mondiale : des millions de morts de dette

mardi 30 juin 1998

Act Up-Paris a interrompu mardi 30 juin à 17h00 la session "International Funding and Policy" à la suite du discours de M. Madavo, vice-président de la Banque Mondiale pour réclamer un engagement public sur l’accès aux soins et aux traitements dans les pays en developpement.

Aux cris de "Release the funds, access for all", quarante activistes du Nord et du Sud ont conspué la Banque Mondiale.

M. Desire N’Dah Koua, séropositif de Cote d’Ivoire a lu au public le texte suivant.
La Banque Mondiale doit aux pays endettés les millions de morts qu’elle a provoqué en contraignant les Etats à restreindre leurs dépenses de santé, en misant obstinément sur le développement des services de santé privés, en favorisant une politique de "recouvrement des coûts" qui oblige les malades du sida à payer leurs soins et leurs traitements dans les services publics. Jusqu’ici son attitude a été d’ignorer les 30 millions de malades qui souffrent et vont mourir. Il y a six mois à la conférence d’Abidjan, dans un rapport honteux, elle n’affichait toujours qu’un objectif : limiter l’expansion de l’épidémie en prêtant aux Etats des millions de dollars pour des politiques de prévention inefficaces, plutôt qu’améliorer l’accès aux traitements.

Alors qu’aujourd’hui des initiatives se multiplient dans ce sens, la Banque Mondiale ne peut refuser de s’impliquer publiquement et de participer cette dynamique d’accès aux soins et aux traitements. Il n’est désormais plus décemment possible d’opposer prévention et soin ; il est clair pour tous que ces deux approches doivent être menées de front et coordonnées.
La Banque Mondiale engage certes ponctuellement des sommes colossales pour l’accès aux traitements contre les maladies opportunistes et les MST, en Ouganda et au Malawi notamment. Mais ces programmes se soldent par des échecs retentissants parce qu’ils ne s’inscrivent pas dans des politiques véritables de restructuration des systèmes sanitaires des pays et ne sont pas coordonnés aux autres efforts internationaux.

La Banque sera responsable au même titre que les autres bailleurs internationaux si d’ici deux ans le sida est considéré comme une de ces maladies exotiques propres aux pays en développement, si la distribution sauvage de traitements antirétroviraux se poursuit dans un contexte sanitaire toujours plus précaire, et si l’épidémie poursuit son expansion.

La Banque doit désormais s’impliquer officiellement dans l’accès aux soins et au traitements : traitement des maladies opportunistes, réduction de la transmission mère-enfant, mise à disposition de traitements ARV.
Elle doit faire de la lutte contre le sida une priorité, engager un playdoyer pour l’obtention de fonds additionnels, désavouer les politiques de recouvrement des fonds.

Elle doit rendre aux Etats les moyens d’une prise en charge médicale décente des millions de personnes atteintes par une épidémie qu’elle a elle-même favorisée.