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Pénalisation de la transmission du VIH

jeudi 1er décembre 2005

Les récentes condamnations [1] pour contaminations « volontaires » révèlent le grave déficit de la prévention en France. Aujourd’hui, des séropositifVEs se tournent vers la justice pour trouver une réponse au drame de leur contamination. Cette réponse ne fait que criminaliser les séropos et ignore le principe de responsabilité partagée.

Ce modèle de prévention, qui considère que chacunE est responsable, pleinement, de soi-même et de son partenaire sexuel, repose sur la solidarité entre séropositifVEs et séronégatifVEs, et non sur la prise en compte du seul statut sérologique pour
dicter les impératifs de prévention.

On ne peut analyser la responsabilité partagée, et encore moins la remettre en cause, sur la base de la responsabilité pénale. Il n’est pas question d’une répartition des
responsabilités à 50 %, mais bien d’une participation pleine et entière de chacunE des partenaires à une relation protégée : je te protège, je me protège. C’est pourquoi il vaudrait mieux parler de responsabilité « conjointe » que partagée.

Comment prétendre que ce modèle a échoué alors que sont ici en cause le manque de moyens alloués à la prévention et les politiques de prévention menées jusqu’à
présent en France ? Aucune campagne grand public n’a ainsi interrogé l’abandon du préservatif dans les relations dites « stables ». Le refus de considérer la question
de la fidélité n’a-t-il pas constitué une approbation tacite de l’idée que le couple
constituerait une prévention objective et efficace ?

De même, il manque une lutte réelle contre les discriminations qui empêchent une pleine responsabilité dans une relation sexuelle. On ne peut faire de la prévention du VIH sans lutter contre les discriminations - sexisme, racisme, rapport de pouvoir lié à l’argent, homophobie, xénophobie, sérophobie - et contre la précarité. S’appuyer sur ces mêmes obstacles pour invalider la responsabilité partagée, faire de la victimisation et promouvoir la pénalisation, c’est imaginer que la justice va pouvoir être un vecteur efficace de ces luttes - un tour en prison suffit à prouver le contraire - et qu’elle va accomplir le travail des administrations sociales et sanitaires. La criminalisation est une insuportable guerre ouverte aux séropos. Elle est aussi l’aveu à peine masqué que la société tolère l’échec des politiques sanitaires. Nous nous battrons contre.


[1Le 28 juin 2004 à Strasbourg, un homme séropositif à été condamné à 6 ans de prison ferme pour « administration volontaire d’une substance nuisible ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente ». Il lui était reproché d’avoir contaminé deux jeunes femmes lors de rapports sexuels non protégés. Il a aussi été condamné à indemniser ses ex-partenaires à hauteur de 230 000 euros chacune. Le 15 novembre 2005 à Cayenne, un homme séropositif à été condamnée à 7 ans de prison ferme pour le même motif et pour celui de « faux et usage de faux en écriture ». Il lui était reproché d’avoir contaminé six jeunes femmes lors de rapports sexuels non protégés. Il a aussi été condamné à indemniser deux de ses ex-parternaires à hauteur de 150 000 et 300 000 euros chacune.