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Les droits des patients (II)

mercredi 11 novembre 1998

Il est facile de consigner, dans le Livret d’Accueil, les horaires de l’Assistante Sociale et d’attendre que le patient se présente. C’est un bilan social complet qui doit être proposé au malade qui le désire, pas un encart d’heures d’ouvertures comme pour le kiosque à journaux

L’hôpital ne joue pas son rôle social

Voilà des années que les associations luttent pour que la communication entre le patient et l’établissement de soin ne soit pas un vain principe. Une Charte existe, Act Up-Paris y est pour beaucoup. Les Livrets d’Accueil sont censés la reprendre dans son intégralité, mais ils n’en présentent, en général, qu’une version résumée.. Il y est question de la qualité des soins, de l’accueil, du censentement libre, de l’accès au dossier etc... Tout cela laisse déjà à désirer (cf. numéro 22).

Mais, sur le plan social, on trouve ces quelques mots : « le service public hospitalier est en particulier accessible aux plus démunis. » L’intégral du texte de la charte parle des plus démunis comme devant « pouvoir faire valoir leurs droits y compris sociaux » et rappelle que les soins doivent « s’accompagner d’une aide dans les démarches administratives et sociales ».

Certes, une assistante sociale, souvent débordée, et elle-même soumise à la logique économique de l’établissement de santé, assure une permanence journalière. Mais ce n’est pas au malade à faire la démarche visant à obtenir un bilan social. Il est déjà psychologiquement fragilisé par sa venue à l’hôpital, son état physique suffit pour qu’on ne lui demande pas, en plus, d’aller à la pêche aux aides que la loi lui propose. Et c’est ainsi qu’on voit des malades, dont l’état physique s’aggrave, ignorer qu’ils peuvent demander une allocation compensatrice pour tierce personne.

C’est ainsi qu’on voit des patients en hôpital de jour venir en transport en commun alors que leur état leur donne parfois droit au remboursement de frais de taxi (même si ce droit est de plus en plus remis en cause dans les faits). C’est ainsi surtout que de nombreux patients ne savent pas encore que, si leur bilan social n’est pas extrêmement solide, ils n’ont guère de chance d’obtenir l’AAH, que les COTOREP refusent à la pelle désormais, sous prétexte que les trithérapies ont amélioré les états de santé.

Non seulement, si cela continue, le progrès scientifique va, du fait du désengement de l’Etat, envoyer des centaines de malades du sida aux A.N.P.E., mais de plus, les hôpitaux seront parvenus, en se défaussant de leur mission sociale, à jouer le rôle économique que les orientations des Ministères de la Santé et des Affaires Sociales leur demandent de jouer.

A la veille du possible dépôt d’un projet de loi surréaliste (cf. Rapport Boulard) considérant les mutuelles (entreprises privées) comme des missionaires sociaux de la santé des plus défavorisés, on assiste au manquement grave des établissements de santé face à un rôle social qu’ils ont l’obligation de tenir concernant leurs patients. Et ce n’est pas la circulaire de janvier 98, qui parle d’une remise personnalisée du livret d’accueil comme d’une occasion de prise de contact, qui changera quoi que ce soit si elle ne crée pas l’occasion d’une présentation des démarches à suivre et des droits sociaux dont le malade peut bénéficier.

En refusant d’être un vrai lieu d’assistance sociale, l’hôpital (et les autorités publiques) portent une lourde responsabilité dans la précarisation actuelle des malades du sida. Comme si sa mission s’arrêtait avec les nouveaux traitements, la santé publique renvoie les patients 10 ans en arrière.

Il devient obscène de parler de progrès.