Accueil > Égalité des droits Homophobie > La révolution tunisienne n’a pas abattu tous les tabous

La révolution tunisienne n’a pas abattu tous les tabous

jeudi 23 février 2012

La lutte contre les préjugés envers les séropos interdite d’antenne

Vendredi 03 Janvier 2012, la direction de la télévision tunisienne a refusé de diffuser la pièce « Danse avec le singe » de Taoufik Jebali. Cette pièce de théâtre, faisant acte de prévention contre le sida auprès du public tunisien, a été jugée trop choquante.
Alors que l’ancienne direction de la télévision tunisienne avait accepté de faire filmer la pièce dans le cadre d’une future diffusion, la position ultra conservatrice et puritaine de la nouvelle direction considère le sida comme un tabou.
Cette autocensure sur un sujet aussi important que la lutte contre le sida est aberrante, Mehdi Mabrouk, ministre de la culture tunisien, a pourtant déclaré « Aujourd’hui, pas de tutelle sur la culture en Tunisie ». Il affirmait également, lors d’une interview à la TAP (Tunis Afrique Press) : « Pas question de restrictions concernant les créateurs et les acteurs culturels ».
Il semblerait que la censure ne soit pas dans la création d’oeuvre mais bien dans la démocratisation et la diffusion de ces œuvres.
En refusant la diffusion d’une œuvre qui invite à ne pas discriminer les séropos, le ministre de la culture et la direction de la télévision tunisienne (sous la tutelle de ce dernier) entretiennent les stéréotypes sérophobes, le rejet des personnes séropositives et font reculer les efforts de prévention et d’information réalisés par le passé, et ici précisément par un artiste.
Le nombre de contaminations a baissé en 2011 en Tunisie.
Cela signifie-t-il pour la nouvelle direction de la télévision tunisienne, qu’il ne faut plus rien faire en matière de prévention ?
Serait-il désormais inutile de diffuser une œuvre ludique et utile, outil de prévention efficace auprès du grand public ?
Au lieu d’informer la population, le ministère fait le choix d’entretenir la sérophobie et l’ignorance, croyant que les contaminations continueront à baisser d’elles-mêmes.

Le ministre de droits de l’Homme tunisien invite les homosexuelLEs à se faire soigner

Alors qu’en octobre 2011 Riad Chaibi, responsable du parti Ennadha au pouvoir en Tunisie, disait sur le site espagnol « ABC » qu’il existait pour eux [ndlr : les homosexuelLEs] un problème de « dignité », « puisque la société les voit comme dévalorisés », en février 2012, soit à peine 4 mois plus tard le ministre des droits de l’Homme Samir Dilou, du même parti, parle des homosexuelLEs en ces termes à la télévision tunisenne :
« Ils [les GLBT] vivent comme des citoyens mais doivent respecter les lignes rouges fixées par notre religion, notre héritage et notre civilisation »
Tout en affirmant la nécessité de soigner toute personne homosexuelle, il s’est également dit contre l’existence du magazine Gayday, sans même l’avoir lu (« même si je suis ministre des Droits de l’homme » a-t-il ajouté).
Il semblerait que pour ce parti, il y ait d’une part les discours volontaristes, et ensuite leur application ou plutôt leur non-application.
Au delà de l’indignation que provoque ce genre de discours où qu’il soit tenu, venant qui plus est du ministre des droits de l’Homme, et sans compter le clin d’oeil Guéantesque que cela nous rappelle en France, Act Up-Paris rappelle que quelque soit le lieu, le régime, la culture, les cultes :
 le silence sur le sida (ici la censure de la diffusion d’une pièce le traitant de façon à casser les stéréotypes) revient à condamner à la discrimination, à l’isolement et à la mort les séropositifs. La censure de cette pièce de théâtre, à la télévision tunisienne, est un acte criminel !
 De plus, au 21eme siècle, la moindre assimilation de l’homosexualité à une perversion ou à une maladie doit être vivement condamnée par les partis de gouvernement. Au lieu de ça, en discriminant, en criminalisant et en isolant les homosexuelLEs du reste de la société, en répandant des mensonges sur eux, ils contribuent à leur fragilité et donc à des conduites sexuelles à risque amenant à de nouvelles contaminations.
On ne le dira jamais assez :

SILENCE = MORT INFORMATION = POUVOIR HOMOPHOBIE = CONTAMINATION COLERE =ACTION

Act Up-Paris réitère sa solidarité aux militantEs LGBT tunisienNEs ainsi qu’à celles et ceux qui sont concernéEs (Cameroun, Ouganda, Algérie, Maroc…) et rappelle son hymne qui se consacre au sida et donc à l’homophobie :
« Contre le sida, tu n’as pas le choix. Bats-toi ! Bats-toi ! Act Up ! Act Up ! »