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12ème conférence Internationale sur le sida : l’écart entretenu.

lundi 6 juillet 1998

Le 3 juillet, Act Up-Paris a interrompu la cérémonie de clôture de la conférence Internationale sur le sida pour dénoncer l’absence d’engagements concrets lors de ce congrès et lire le texte suivant : Accès aux soins et aux traitements dans les pays en développement ?

En ce qui concerne les pays en développement, deux aspects ont été abordés principalement ici : la transmission verticale et le vaccin. Enfin nous parlons de la transmission mère-enfant, mais nous posons la questions à l’OMS, que deviendront les mères ? La recherche vaccinale est essentielle mais elle ne doit pas être servir de prétexte pour qu’ONUSIDA se permette de revoir à la baisse les standards éthiques internationaux.
L’absence des décideurs politiques et des bailleurs de fonds internationaux a permis d’occulter cette question de l’accès aux traitements, pourtant fondamentale. La Communauté Européenne est restée silencieuse, malgré la rumeur d’une réduction de son budget sida, toujours pas démentie. La Banque mondiale, quand à elle, refuse même de prononcer le mot traitement. Les seuls à avancer des propositions concrètes sont les compagnies pharmaceutiques qui ont annoncé des réductions de coût de leur produits pour les pays en développement ; elles voient bien leur intérêt pour ce marché de 28 millions de malades.

Les bailleurs de fonds internationaux campent sur leur position et maintiennent leur approche superficielle de l’épidémie. Ils ne parlent que de prévention comme unique priorité par soucis d’économie. Ils refusent de comprendre que sans accès aux soins et aux traitements une prévention véritablement efficace est impossible. Ils refusent d’engager les moyens financiers nécessaires pour réellement prendre en charge la situation actuelle. Paradoxalement, ils refusent aussi de prendre en compte les conséquences économiques de l’épidémie aux niveaux local et national.

Le Fond de Solidarité Thérapeutique International est toujours vide. Aucun bailleurs n’a clairement annoncé de soutien financier aux programmes d’accès aux traitements de l’ONUSIDA. Aucune alternative n’a été proposée. La Banque Mondiale et l’Europe, au même titre que les décideurs politiques et les autres bailleurs, seront responsables des conséquences, si dans deux ans le sida est considéré comme une maladie exotique spécifique aux pays en développement.

Contrôle de l’épidémie au nord ?

Hypocritement, le slogan de cette conférence, " Réduire l’écart ", a principalement servi à passer sous silence les problèmes actuels au nord. La cérémonie d’ouverture a donné le ton : on proclame le contrôle de l’épidémie au nord.

Peut-on parler de contrôle de l’épidémie malgré les effets secondaires des traitements et les contraintes énormes imposées aux patients, malgré les résistances, l’absence d’alternatives et les échappements thérapeutiques.

Peut-on parler de contrôle de l’épidémie alors que des minorités sont exclues de l’accès aux soins et aux traitements par des lois répressives. Les immigrés meurent parce que les frontières leurs sont fermées par les gouvernements du nord. Les usagers de drogue meurent parce qu’ils sont marginalisés par des lois prohibitionnistes et meurtrières. Pourtant durant cette conférence, toutes ces questions ont été reléguées à des sessions satellites : on a seulement entendu parlé de réduction des risques et on refuse de remettre en cause les cadres législatifs et leurs conséquences.

Parler du contrôle de l’épidémie au nord, c’est aussi oublier la recrudescence de discrimination à l’égard des personnes atteintes, discrimination, voire persécution : Il existe une loi suisse qui autorise l’État a incarcérer les personnes infectées soupçonnées d’avoir transmis le virus. Nous avons régressé à ce point qu’une journaliste italienne puisse se permettre de parler des personnes atteintes comme d’une " armée de contaminateurs ".
Dans ces conditions, l’écart n’a certainement pas été réduit et l’espoir d’une prochaine conférence plus constructive est compromis. Nous dénonçons le monopole de la Société CONGREX sur l’organisation et la gestion des conférences internationales sur le sida, ainsi que la nature des relations qu ’elle entretient avec International Aids Society Nous exigeons que soit réalisé une évaluation externe du travail de Congrex sur cette conférence, et un appel d’offre ouvert pour les prochains congrès.