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focus sur la surinfection

Etude de cas

mai 2005

Surinfection chez le singe, pourvu que BB ne le sache pas...

Les études in vivo chez l’animal sont la meilleure approche de la surinfection puisque le modèle animal permet le contrôle de la quantité, de la voie d’entrée et des souches du virus mis en jeux. Cependant on ne dispose actuellement que d’un petit nombre d’études chez l’animal. Alors que le chimpanzé représente le seul primate non humain chez lequel étudier l’infection par le VIH-1, le sida n’atteint pas vraiment ce singe et l’apparition d’une charge virale n’est en définitive jamais obtenue. En revanche le macaque, modèle de l’infection par le virus de l’immunodéficience simienne, SIV, est un modèle très précieux pour étudier le processus de développement de l’infection, il est également indispensable aux études visant à développer un vaccin. Ainsi, la surinfection a pu être reproduite chez le macaque. Au cours d’une expérience, un groupe de singes a été initialement infecté par une souche VIH-2 puis surinfecté 2 à 72 semaines plus tard par une autre souche de ce virus. Plus le délai entre contamination initiale et tentative de surcontamination était grand moins la proportion de singes effectivement sur infectée était importante. Ainsi si 2 semaines séparaient contamination initiale et la tentative de surcontamination, tous les animaux étaient effectivement surinfectés, mais en portant ce délai à 8 semaines, plus aucun animal n’était finalement atteint de surinfection. Par conséquent, chez le macaque, la période de susceptibilité à la surinfection était aux 8 premières semaines suivant l’infection primaire. Cette période est indépendante du taux de cellules CD4, de l’agressivité du virus ou du taux d’anti-corps neutralisant. En revanche, il semble que la période de susceptibilité à la surinfection soit influencée par la maturation de la réponse immunitaire du singe ou à un mécanisme inconnu aboutissant à l’exclusion du deuxième virus. Une autre expérience concernant le suivi pendant une longue période d’un chimpanzé a montré, plus de 9 ans après la surinfection, outre la présence des deux souches responsables de l’infection initiale et de la surinfection, celle de forme recombinantes. Or, puisque la fréquence et le nombre de virus recombinantes du VIH-1 isolées dans la population mondiale croît de manière incessante, il s’agit là d’un argument indéniable en faveur de la surinfection par le VIH-1 chez l’homme.

Surinfection chez l’homme, pourvu que cela se sache...

Chez l’homme, au cours des semaines qui suivent la contamination par le VIH-1, se met en place une réponse immunitaire généralement à l’origine d’une diminution très importante de la charge virale. Cette réponse immunitaire spécifique implique les CD8 qui jouent un rôle fondamental dans le contrôle de la réplication virale et protège partiellement l’organisme contre le virus. De fait, il semblait raisonnable de penser que cette réponse immunitaire, même imparfaite, empêche la surinfection. Malheureusement, la publication récente dans des revues scientifiques de cas avérés de surinfection indique que la protection immunitaire mise en place par l’organisme est insuffisante pour prévenir ce phénomène.

A retenir

La surinfection chez le singe est possible et sa survenue semble limité à un certain délai après l’infection initiale, nous verrons que chez l’homme les choses semblent différentes. De plus, la surinfection chez l’animal conduit à l’apparition de virus recombinants, comme plusieurs virus recombinant ont été isolés chez l’homme, il est plus que raisonnable de penser que chez celui-ci la surinfection VIH-1 est une réalité.

Surinfection par deux souches VIH-1 de sous-types différents : sur infection HIV-1 inter sous type

Surinfection par échange de seringues.
Le premier cas publié concerne la surinfection inter sous-type observée chez deux usagés de drogue par voie intraveineuse faisant partie d’une cohorte de séronégatifs usagés de drogue de Bangkok en Thaïlande. Les personnes de cette cohorte ont un risque élevé de contracter une infection par le sous-type B et un virus recombinant CRF01_AE. La première personne fut initialement infectée par CRF01_AE puis un à deux mois plus tard par une souche du sous-type B. Les deux souches étaient détectables dans le plasma de la personne 12 mois plus tard. La deuxième personne fut, quant à elle initialement infectée par une souche du sous-type B puis, environ 8 mois plus tard, par CRF01_AE. Pour chacune de ces personnes, la réponse immunitaire initiale était dirigée uniquement contre le virus responsable de la première infection. Une réponse immunitaire croisée, c’est à dire active sur les deux sous type B et CRF01_AE, n’a été observée qu’après la surinfection. Cette observation montre que la réponse immunitaire à une première infection par le VIH-1 est spécifique de la souche impliquée et par conséquent ne peut pas prévenir la surinfection par une autre souche.

Surinfection par rapport sexuel non protégé.
Un cas de surinfection inter sous-type par contamination sexuelle concerne une personne initialement contaminée par CRF01_AE et traitée par une multithérapie antirétrovirale durant les 27 mois suivants. Par ailleurs, cette personne fut engagée dans un essai vaccinal entre les 21ème et 27ème mois après l’infection initiale et la multithérapie fut interrompue conformément au protocole de l’essai clinique. Trois mois après l’arrêt du traitement antirétroviral et environ 3 semaines après plusieurs rapports sexuels non protégés survenus au Brésil, un rebond soudain de la charge virale était constaté chez cette personne. Par la suite le sous-type B, endémique dans ce pays, était détecté chez cette personne. Alors que seul le sous type CRF01_AE était détecté avant la surinfection, les 2 sous type B et CRF01_AE étaient présents immédiatement après celle-ci. Finalement, à distance dans le temps de la surinfection, seul B était retrouvé, CRF01_AE n’étant plus détecté qu’à l’état de trace et de façon intermittente. D’un point de vue clinique, la surinfection de cette personne par le sous-type B à conduit à une chute très sévère du taux de lymphocytes CD4 et à une progression rapide de la maladie.

Surinfection par deux souches VIH-1 du même sous type : sur infection HIV-1 intra sous-type

Un premier cas.
Deux cas relatifs à une surinfection VIH-1 intra sous-type ont été décrits, le premier concerne une personne initialement infectée par une souche virale du sous-type B et traitée par multithérapie antirétrovirale avant la séroconversion, c’est à dire avant l’apparition des anticorps anti VIH-1. Après environ un an et demi de traitement avec succès virologique, la personne fut dans un essai d’interruption thérapeutique. Environ deux mois après le début d’arrêt de traitement, un rebond virologique à 140000 copies de RNA VIH-1/mL imposait la reprise de la multithérapie. En revanche, lors de la deuxième interruption de traitement, la charge virale resta sous contrôle, moins de 1000 copies/mL, pendant plus de 9 mois au terme desquels, suite à plusieurs rapports sexuels non protégés, la personne fut sur-infectée par une autre souche du sous-type B. Le résultat fut une augmentation de la charge virale à plus de 50000 copies/mL et une chute du taux de lymphocytes CD4 à 500 cellules/ ?L. Une étude poussée ayant permis de constater l’absence de souche virale responsable de la surinfection avant que celle-ci n’intervienne montre que le système immunitaire peut être capable de contrôler la réplication d’une souche virale du sous type B tout en étant incapable de contrôler celle d’une autre souche du même sous-type.

Mais que s’est-il donc passé ???
Chez cette personne, bien que la réponse immunitaire induite par les cellules T CD8+ spécifique du VIH-1 ait été initialement faible après contamination et initiation du traitement, cette même réponse fut considérablement augmentée au cours de la première et de la deuxième interruption de traitement. Ainsi, au moment de la surinfection le système immunitaire de cette personne, était tout à fait efficace contre la première souche virale, responsable de l’infection initiale. Hélas, après la surinfection, la deuxième souche virale a rapidement pris le dessus, devenant prédominante, alors que la première souche virale était à peine détectable. En fait, les deux souches virales ne différaient que très peu mais cela a suffit à rendre inefficace le système immunitaire contre la souche responsable de la surinfection alors qu’il contrôlait parfaitement la réplication de la souche responsable de l’infection initiale.

Un deuxième cas.
Ce premier cas avéré de surinfection par un virus intra sous-groupe a rapidement était suivi par la description d’un cas similaire. A nouveau, la personne concernée fut prise en charge médicalement au moment de la primo-infection par un virus du sous-type B résistant à certains antirétroviraux. La personne ne fut pas immédiatement traitée car sa charge virale n’excédait pas 8000 copies/mL, cependant, après 4 mois, celle-ci passa brutalement à 200000 copies/mL Comme dans le cas de l’infection initiale, une analyse génotypique devait révéler une surinfection par un virus du sous-type B, à la différence qu’il s’agissait cette fois-ci d’une souche sauvage appartenant au même sous-type. Ce deuxième cas confirme la possibilité d’une surinfection en l’absence de traitement ou de vaccination. Il confirme également, la capacité qu’a une surinfection à accélérer la progression de la maladie, à condition qu’il y ait une différence marquée en terme de multiplication virale dans l’organisme de chacune des souches responsables de l’infection initiale et de la surinfection.

A retenir

La surinfection par échange de seringue ou par voie sexuelle est possible. Elle peut impliquer des souches virales appartenant ou non au même sous type. Elle montre que l’infection par une première souche du VIH-1 n’induit pas nécessairement une protection croisée, c’est à dire suffisamment efficace pour prévenir dans tous les cas la surinfection par une autre souche du VIH-1. Enfin la surinfection peut être la cause d’une progression accélérée de la maladie.