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« Enfin un vaccin pour les malades du sida ! » selon Le Parisien : Attention aux titres racoleurs et aux effets d’annonce

jeudi 13 février 2003

L’article paru dans l’édition du Parisien daté de Mercredi 12 Février intitulé « Enfin un Vaccin pour les malades du sida ! », signé par Marc Payet est une compilation d’erreurs et d’approximations dangereuses que nous tenons en tant que séropositifs et représentants associatifs à dénoncer publiquement.

Dans son article Marc Payet parle de « vaccin curatif », adjectif plus que mensonger quand on sait que les travaux de l’ANRS dont il est question font appel à une stratégie expérimentale d’immunothérapie vaccinale (ou de vaccin thérapeutique). Ni lors de la conférence de presse de l’ANRS de vendredi 7 février ni dans le dossier de presse remis aux journalistes il n’a été mentionné le terme « curatif ».

D’autre part dans son article, l’auteur laisse entendre que « d’ici à trois à cinq ans on peut espérer une mise à disposition d’un vaccin curatif totalement efficace », là encore jamais l’ANRS ni le Pr. Michel Kazatchkine ou le Pr. Christine Katlama pas plus que le Pr. Yves Lévy n’ont fait de telles annonces. Bien au contraire, ils se sont tous évertués à nous mettre en garde contre un optimisme trop débordant tout en reconnaissant que les résultats préliminaires de ces 2 essais sont très encourageants.

De plus il n’a jamais été question comme l’affirme Marc Payet que les séropositifs puissent abandonner leurs trithérapies en les substituant par ce « vaccin curatif ». Au mieux cette stratégie permettra-t-elle de pouvoir interrompre de façon plus ou moins longue les trithérapies et ainsi permettre à l’organisme de « se reposer » des nombreux effets indésirables qui sont le prix à payer pour un contrôle du VIH.

Par ailleurs on peut se poser de sérieuses questions quant à la déontologie d’une personne qui se dit journaliste et qui non seulement ne respecte pas l’embargo auquel nous avons tous souscrit et qui nous interdisait de faire paraître quoi que ce soit avant mercredi 12 février 16 heures, mais qui de plus n’a pas assisté à la conférence de presse et n’a visiblement rien compris aux documents sur lesquels il a mis la main on ne sait comment, qui ne s’est pas donné la peine de s’assurer qu’il avait bien compris les informations que visiblement il ne maîtrisait pas.

En fait de quoi s’agit-il ?

Les résultats présentés par l’ANRS à la Conférence Internationale sur les Rétrovirus (CROI) qui se tient à Boston (USA), sont effectivement encourageants. Les résultats de ces 2 essais de vaccinothérapie (VACCIL-2 et VACCITER) montrent pour la première fois qu’il est possible d’induire une réponse immunitaire dirigée contre le VIH chez des patients séropositifs. Cette réponse immunitaire est associée à un certain degré de contrôle de la charge virale. Ces résultats confirment l’intérêt de poursuivre l’évaluation de la vaccinothérapie chez des personnes infectées par le VIH et devront être suivis de nombreux autres essais sur un nombre important de séropositifs avant que de pouvoir réellement valider cette nouvelle stratégie thérapeutique. Il ne s’agit donc là que de la validation d’une hypothèse de travail et non de la découverte d’un vaccin miracle.

Au regard des chiffres et des résultats présentés, tout excès d’optimisme, à l’image de ce que nous avons pu lire dans le Parisien ou ailleurs nous paraît déplacé. Ce genre d’effet d’annonce va sans aucun doute susciter de faux espoirs chez les malades du sida, notamment chez ceux qui subissent un traitement très lourd et risquer d’encourager le développement des pratiques à risque qui sont en constante augmentation dans tous les segments de la population française.

De plus la publication d’un tel article avant même la présentation de ces résultats a déjà eu pour effet de brouiller la communication de l’ANRS, qui était bien à la fois plus prudente et plus précise quant aux perspectives qu’offrent les résultats de ses essais phase 1 et 2.

Tous dans nos permanences associatives et sur nos lignes téléphoniques d’information, nous avons eu à rectifier l’article du Parisien qui relève d’une véritable désinformation.

En attendant, les malades du sida vont sans doute devoir (même si certains espoirs sont permis) se contenter encore longtemps des multithérapies. Le sida est toujours une maladie mortelle dont on doit se protéger.