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Conférence Foie et VIH à Marseille

Du diagnostic à la greffe

janvier 2010

Pour les personnes co-infectées par une hépatite et le VIH, les décès sont très majoritairement dus à des problèmes hépatiques. C’est ce qui ressort de l’études de mortalité du Dr Rosenthal et de l’Etude Mortalité 2000-2005 du Pr Salmon-Ceron.

Deux militants d’Act Up-Paris étaient présents à la conférence « Foie & VIH », les 19 et 20 novembre 2009 à Marseille. Une piqûre de rappel de ce que Cologne nous avait appris.

Suivi d’une cirrhose en cas de co-infection

A partir d’une pré-cirrhose (F3), il faut déjà commencer la surveillance du CHC par échoraphie, vu l’accélération de fibrose provoquée par de multiples facteurs hépatotoxiques chez les co-infectés.

Tous les 6 à 12 mois, la surveillance de la carcinogénèse chez un cirrhotique consiste en une série d’examens, dont la régularité est essentielle.
 Une échographie abdominale : il est impératif d’avoir recours à un échographiste expérimenté dans le dépistage précoce de petits carcinomes hépatocellulaires. Les dernières études montrent finalement que des échographies tous les six mois suffisent.
 Un dosage plasmatique des alpha foeto-protéines : c’est le suivi régulier de leur l’évolution qui est utile. Attention, un taux normal de ces glycoprotéines n’écarte pas à 100 % la survenue d’un CHC. Une progression régulière du taux d’alpha foeto-protéines au delà de 60 microgrammes peut évoquer la survenue d’un carcinome hépatocellulaire, alors que des résultats en yoyo semblent beaucoup plus difficiles à interpréter.

Pronostic du traitement d’une cirrhose VHC

Dans le cas du VHC, une réponse virologique prolongée, c’est-à-dire l’absence de charge virale 6 mois après l’arrêt du traitement, signifie un état de rémission que les médecins n’hésitent pas à qualifier de guérison. Rappelons qu’en cas de réponse virologique prolongée obtenue avant la survenue d’une cirrhose, les études sont unanimes et confirment qu’il n’y a plus de risque d’évolution vers les complications morbides du VHC, greffe ou Carcinome Hépato-Cellulaire (CHC).

En cas de réponse virologique prolongée après une cirrhose, ayant permis une régression de fibrose inférieure à F2, il n’y a pas de risque de carcinome hépatocellulaire ou de greffe, même chez les personnes co-infectées.
Cependant, en cas de réponse virologique prolongée après une cirrhose, si le score de fibrose est supérieur ou égal à F2, alors un CHC peut quand même survenir. Ce risque non négligeable de survenue d’un CHC reste de 5 % à 12 ans. Suite à une cirrhose, et malgré une « guérison » de l’hépatite virale, il reste donc capital de continuer à faire un suivi par échographies de dépistage de CHC au moins tous les 6 mois.

On ne peut jamais être sûr qu’il n’y ait pas de reprise de fibrose due à d’autres facteurs que le VHC comme par exemple, l’hépatotoxicité des antirétroviraux, un syndrome métabolique pouvant provoquer une NASH, etc.

Diagnostic de CHC

Pour le suivi d’une cirrhose, le score de Child Pugh tend à être remplacé par le score MELD [1], qui est plus fiable pour suivre des fibroses rapides comme chez les co-infectés.

Pour un diagnostic de carcinome hépatocellulaire, les biopsies sont remplacées aujourd’hui par 3 techniques récentes d’imageries médicales : l’angio scanner, l’IRM et l’échographie abdominale avec produit de contraste.

La taille des nodules détermine les différents types de prise en charge :
 inférieur à 1 cm, un suivi à 3 mois permettra d’aviser ;
 de 1 à 2 cm, deux examens différents d’imagerie sont nécessaires pour confirmer le diagnostic de carcinome hépatocellulaire ;
 supérieur à 2 cm, un seul examen d’imagerie permet de poser le diagnostic.

Traitement du CHC

Une approche empirique mais prometteuse, a été développée par les américains. Il s’agit du : « Down Staging ». Cette méthode consiste par exemple, en cas de nodules de plus de 10 cm, supérieurs aux critères d’admission en liste d’attente de greffe, à utiliser des méthodes de sauvetage afin de retrouver des critères thérapeutiques, c’est-à-dire des nodules inférieurs à 6 cm, qui permettront d’envisager ensuite une inscription en liste d’attente de greffe.

Un premier traitement par voie orale contre le CHC donne de bons résultats : le sorafénib (Nexavar®, c’est un inhibiteur de protéine kinase). Il s’agit d’un traitement « anti-angio-génique ». Il vise à détruire les petits vaisseaux permettant d’alimenter le nodule cancéreux, afin de lui « couper les vivres ». La durée de prise du sorafénib peut atteindre dix mois et offrirait enfin une approche moins contraignante que les chimio et radiothérapies.

Liste d’attente de greffe

Pour être inclus, en liste d’attente de transplantation hépatique qui est le traitement de référence d’un CHC, il existe une nouvelle méthodologie qui étend le champs des inclusions. Les critères sont les suivants :
 les critères de Milan (ancienne méthodologie) : définis par trois nodules maximum, totalisant au plus 6,5 cm,
 les critères de San Francisco (nouvelle méthodologie) : quelques soit le nombre de nodules du moment que le cumul de nodules totalise un maximum de 8 cm.

Ainsi en France, les recommandations de greffe pour les personnes co-infectées sont basées sur les critères de Milan, mais pourtant 30 % de ces greffes réalisées dans les centres pilotes pour les co-infectés, le sont sur des critères de San Francisco.

Greffe et co-infection

Aujourd’hui, la greffe reste le traitement de référence du carcinome hépatocellulaire chez les co-infectés. Les délais en liste d’attente atteignent régulièrement les dix mois, ce qui est particulièrement risqué avec cette indication ou les délais moyens de survie sont de 14 mois d’après une étude espagnole.

D’après les recommandations éthiques, les bénéfices escomptés d’une greffe du foie, est d’offrir une survie de 5 ans minimum à au moins 50 % des candidats.

Mais les derniers résultats publiés de l’étude américaine multicentrique sur les co-infectés, sont très préoccupants pour l’avenir des greffes de ces personnes : à 3 ans, il n’y a que 59 % de survie dans cette étude. Il faut donc dès aujourd’hui prévoir de défendre âprement l’utilité de cette indication.

En effet, certains chercheurs n’hésitent pas à remettre en cause les greffes pour les alcooliques et les co-infectés. L’exclusion reste un argument pour ces « carabins » face à la pénurie de greffons. Le grand risque est d’assister prochainement, à des tirages au sort en liste d’attente.

Pronostic à 5 ans

Chez les co-infectés, un carcinome hépatocellulaire diagnostiqué et correctement pris en charge à un stade précoce (nodule inférieur à 1 cm) permet un taux de survie à cinq ans de 50 % sachant malgré tout que pour la moitié d’entre il y aura la survenue d’une récidive de CHC. Aujourd’hui, nous pouvons conclure que les deux indications ayant les meilleurs pronostics de survie suite à un carcinome hépatocellulaire parmi les personnes vivant avec le VIH, sont les co-infectées VIH-VHB et celles séropositives et alcooliques !


[1MELD : Mayo End Liver Disease score issu de la Clinique Mayo qui définit l’état de la maladie hépatique terminale.