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500 morts en prison

lundi 20 mai 2002

En 2000, deux rapports, celui de l’Assemblée nationale « La France face à ses prisons » et celui du Sénat « Prisons : une humiliation pour la République », alarmaient le gouvernement. Bilan de l’inaction de Marylise Lebranchu. Et premier bilan des actions que nous avons menées depuis quelques semaines.

Le bilan du gouvernement

En 2000, deux rapports, celui de l’Assemblée nationale « La France face à ses prisons » et celui du Sénat « Prisons : une humiliation pour la République », alarmaient la Garde des Sceaux. Ils concluaient sur trente mesures d’urgence à prendre immédiatement pour tenter d’endiguer la catastrophe carcérale constatée. Lebranchu n’en a appliqué aucune.

Pourtant depuis deux ans, Marylise Lebranchu n’a rien fait pour les détenus, leur famille, leurs proches : elle les a ignorés. Sa seule action a été de lancer la construction de nouvelles prisons, et d’enfoncer encore un peu plus la France dans une logique pénitentiaire.

Malgré ces deux années au gouvernement, l’injonction des experts, les moyens, et le pouvoir de faire changer les choses, rien n’a bougé. Sauf les commissions et les spécialistes convoqués pour établir plusieurs versions d’un projet de loi pénitentiaire, ultra sécuritaire, en contradiction avec les propositions du Conseil d’Orientation et de Suivi, et qui finalement est mis aux oubliettes, faute de temps.

Pendant ce temps, la prison continue à tuer ; viols, dans l’indifférence générale, suicides récurrents (chaque année, plus de 100 détenus se pendent, se coupent les veines), agonies et morts de malades, qui attendent en vain que M. Chirac et Mme Lebranchu ne jettent un œil sur leur demande de grâce. L’Administration Pénitentiaire met en danger ses détenus, qu’elle doit légalement protéger. Bilan du gouvernement : plus de 500 morts en cinq ans dans les prisons françaises.

Aujourd’hui, au lieu de vider les prisons, on en construit. Le gouvernement justifie cette nouvelle politique par la mise en œuvre d’une incarcération plus humaine. L’incarcération n’est pas humaine et ne peut pas le devenir. Cette logique est une logique d’enlisement. Chaque nouvelle prison construite et chaque nouvelle incarcération sont des aveux d’échec politique. Les conditions de détention en France relèvent d’une situation d’urgence, à laquelle les pouvoirs publics doivent répondre immédiatement et effectivement.

Nous n’acceptons plus l’écart entre les discours de nos gouvernants et la pratique de leur administration. Nous ne supportons plus ces discours dont le seul effet concret est de masquer les pratiques criminelles de l’administration pénitentiaire. C’est une situation dramatique et inacceptable.

Contrairement à Mme Lebranchu et M. Jospin, nous ne croyons pas à l’idée qu’il faut corriger la prison par la prison. Act Up-Paris tient cette conduite politique pour irresponsable et criminelle.

Premier bilan des actions d’Act Up

Le 07 Octobre 2001, lors du Colloque pour les vingt ans de l’abolition de la peine de mort, nous interpellions Mme Lebranchu, exigeant qu’elle agisse vite. Face à l’urgence que nous dénoncions, M. Forni, Président de l’Assemblée Nationale répondait que "le temps législatif et républicain" était forcément lent…

Et le temps des morts en milieu carcéral ? Le bilan parle de lui-même. Il était prévisible. Rien n’a été fait contre ce vaste échec politique. Act Up a donc décidé d’engager une série d’actions contre l’immobilisme du gouvernement et pour que la Garde des Sceaux nous rende les comptes que nous sommes en droit d’obtenir.

Le 08 Février 2002, une vingtaine de militants d’Act Up dénonçait devant le Palais de justice de Paris le sort des détenus et tout particulièrement des malades atteints de pathologies graves. Cette action visait les juges qui, sous couvert d’une stricte application de la loi, cautionnent mécaniquement, par leur décision, la mise à mort de certaines personnes.

Le 11 Février 2002, deux militants interpellaient les députés présents au colloque Mialet, pour dénoncer leur inaction. Nous leur rappelions les trente mesures d’urgence, les malades attendant leur grâce médicale. Ils n’ont rien su nous répondre. Leurs silences et leurs yeux baissés sont insupportables, et ne font que renforcer l’idée et l’image de leur inaction, alors même que leur seule et unique fonction est d’agir.

Le 15 février 2002, un groupe d’activistes décide d’aller tracter devant l’hôpital pénitentiaire de Fresnes. Act Up exigeait alors la fermeture de l’unique hôpital pénitentiaire de France, considéré comme hôpital public par l’administration pénitentiaire, mais qui est en fait une véritable prison où on laisse mourir des détenus alors qu’ils devraient être libérés. Le système des grâces médicales empêche en outre toute libération effective.

Le 07 Mars 2002, la Présidente d’Act Up-Paris et une militante de la commission prison interpellent Mme Lebranchu lors d’un colloque organisé par l’association Droits d’urgence. L’action est claire. Il s’agit d’empêcher le discours de la Garde des Sceaux, qui n’ayant rien fait, n’a, pour Act Up, rien à dire.

Le 14 Mars 2002, vingt-cinq militants organisent un picketting devant le Ministère de la Justice pour dénoncer une fois encore l’irresponsabilité de ce ministère. La seule réponse fut une escorte de C.R.S. Ce silence ne fait que confirmer l’inaction que nous dénonçons. Act Up est d’autant plus en colère. Nous poursuivrons ces actions jusqu’à ce que les responsables réalisent que leur inertie a tué, tue et tuera encore de nombreuses personnes si aucune mesure d’urgence n’est prise.

Act Up-Paris exige :
 La libération immédiate des détenus atteints de pathologies graves, des sans-papiers, des usagers de drogues
 Que Mme Lebranchu et M. Jospin s’expriment sur leur inaction concernant les conditions des détenus, laissé sans droit, dans des prisons insalubres.