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La Russie au bord du gouffre : accès aux traitements

dimanche 15 mai 2005

Des moyens pour l’accès aux traitements ridicules

Les autorités russes ne voient pas la nécessité de fournir des traitements contre le VIH. A Saint-Petersboug, ville « privilégiée » par rapport au reste du pays, 250 personnes sur 25 000 séropositifs officiellement enregistrés ont des traitements de la part de la ville en 2004. A Tomsk, en Sibérie, un séropo sur 700 officiellement enregistrés reçoit une trithérapie. Sur l’ensemble du territoire, selon les associations, 140 000 personnes au moins auraient besoin de traitements. Selon le gouvernement russe, 5000...

Au-delà du refus institutionnel de financer ces traitements, les séropositifs se heurtent à des difficultés administratives énormes : l’inscription à la Sécurité sociale, qui permet la gratuité des soins, se fait dans la ville de votre naissance. Si vous résidez ailleurs, il est possible d’obtenir des inscriptions provisoires. Mais elles ne permettent pas de couvrir les soins liés aux MST, à la tuberculose ou encore au vih. Ce dispositif absurde, héritier du soviétisme, est un obstacle de plus à l’accès aux traitements.

Un comité de sélection où dominent les institutionnelLEs (médecins, représentantEs des administrations sanitaires, du budget, etc.) choisit les malades « dignes » d’accéder aux traitements. Une sélection est faite, qui écarte tousTEs ceux et celles jugéEs « indignes » : usagers de drogues, alcooliques, personnes vivant dans la rue, etc. Les enfants ont cependant tous accès aux traitements quand ils en ont besoin. Pour les autres, entre le financement insuffisant et les pratiques discriminatoires, il n’y a aucune place pour un accès aux ARV.

La vie des malades russes contre les profits de l’industrie pharmaceutique

La seule solution est alors d’acheter soi-même ses traitements. Mais à 12 000 dollars par an, une trithérapie est inabordable. La production et/ou l’importation de génériques devient donc une priorité. Depuis un an, les autorités russes ne cessent de promettre aux activistes l’enregistrement de médicaments génériques L’industrie locale est évidemment très intéressée, et certains labos sur les starting-blocks. Mais il n’existe aucune volonté politique pour faire baisser le prix des médicaments à 700 dollars par an.

Il y a urgence : le Fonds mondial a débloqué des ressources (120 millions de dollars sur 5 ans) qui devraient permettre la mise sous traitement d’un millier de personnes supplémentaires. Mais le programme d’accès aux traitements, qui devait débuter cet été sur la base d’une réduction des prix promise par trois laboratoires pharmaceutiques, est aujourd’hui remis en cause. BMS et Boehringer Ingelheim ont en effet annoncé qu’ils ne pouvaient pas se permettre de baisser les prix — cela signifie que moins de personnes recevront de traitements. Merck, de son côté, prétend ne pas pouvoir fournir les traitements demandés avant décembre, car il serait « débordé ». Une fois de plus, la logique de profits s’impose aux besoins des malades.

Des essais cliniques en toute opacité

Le dernier recours pour avoir des traitements est de s’inscrire à des essais cliniques. Or, ceux-ci sont tenus dans la plus parfaite opacité. Il s’agit exclusivement d’essais privés visant à l’inscription de nouveaux médicaments, comme le T20 de Roche ou le Kaletra d’Abott, auprès de l’administration russe.
Au cours de leur mission, les militants d’Act Up n’ont pu obtenir aucune information claire sur la conduite de ces essais. Cela est plus qu’inquiétant : vu la faiblesse de l’accès aux traitements, les séropositifVEs russes sont des cobayes faciles pour une industrie pharmaceutique qui entend aller au plus vite pour occuper le marché national, donc de passer outre les règles éthiques élémentaires.