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Dossier Altérations neurologiques dans le contexte de l’infection à VIH

Un peu d’histoire

mardi 1er mars 2005

L’introduction des multithérapies a considérablement changé la donne en matière d’encéphalite à VIH et d’infections opportunistes du SNC chez les personnes séropositives au VIH.

Cependant, malgré l’avènement des thérapies antirétrovirales hautement actives et les bénéfices acquis en termes de survie, les neuropathologies sont toujours très répandues, en raison de la toxicité des antirétroviraux et de leur faible pénétration dans le SNC, mais aussi à cause de l’apparition de souches virales résistantes aux traitements. L’utilisation des traitements permet, a posteriori, de distinguer quatre périodes dans l’épidémie de sida.

Avant l’arrivée des premiers traitements ARV

La première, ou période pré-traitements, s’étend de 1982 à 1987, elle est marquée par l’absence de traitements et reflète l’histoire naturelle de la maladie. Des études fondées sur l’autopsie de personnes décédées à la suite d’un sida montrent que plus de 60 % d’entre elles présentaient une atteinte du SNC par le VIH ou d’autres agents pathogènes opportunistes. Les pathologies les plus fréquemment rencontrées étaient l’encéphalite à VIH, la myélopathie vacuolaire (inflammation de la moelle épinière), la méningite lymphocytaire, la poliodystrophie diffuse ; venaient ensuite les encéphalites à cytomégalovirus, l’aspergillose, la leucoencéphalopathie multifocale progressive (LEMP), la toxoplasmose, et enfin les méningites bactériennes. La sévérité et la distribution des atteintes du SNC étaient le plus souvent liées à la charge virale présente dans ce tissu. En fait, le VIH n’attaque pas le neurone, cellule clef du système nerveux, directement, mais via l’infection des macrophages et des cellules microgliales (macrophages du cerveau) et par les substances issues du processus inflammatoire. Ce mécanisme indirect aboutit à une atteinte sélective de certaines populations de neurones et de la substance blanche. Dans certains cas, ces atteintes précédaient des dysfonctionnements cognitifs majeurs (trouble de la perception, de la mémorisation et du raisonnement, etc.). Heureusement, l’introduction des multithérapies a généralement permis de limiter la réplication virale et, de ce fait, a contribué à réduire la sévérité des atteintes du SNC.

Et puis les ARV ont fait leur apparition

L’arrivée des premiers antirétroviraux et l’enrichissement de l’arsenal thérapeutique va progressivement modifier la prise en charge des troubles neurologiques. Cette deuxième période, celle des monothérapies, s’étend de 1987 à 1992 et correspond à l’utilisation des premiers inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse (INTI), zidovudine (Rétrovir®) et didanosine (Videx®) seuls. Au cours de cette période, l’utilisation de doses massives de zidovudine a permis de vaincre la démence associée au VIH et, ce faisant, a montré le bénéfice que pouvait représenter les antirétroviraux dans le traitement des neuropathologies dues au VIH [1]. La troisième période, de 1992 à 1995, correspond à l’utilisation des premières combinaisons d’antirétroviraux, ainsi qu’à l’introduction de nouveaux INTI tels que la stavudine (Zerit®). Au cours de ces années, l’utilisation de bithérapies permet d’empêcher la réplication du VIH dans le liquide céphalo-rachidien. Enfin, la quatrième période court de 1996 à aujourd’hui et correspond à l’introduction des multithérapies. Elle est marquée par de profonds changements dans la prise en charge des atteintes neurologiques liées au sida puisque plusieurs molécules réussissent à pénétrer le SNC en quantité suffisante pour combattre le virus.

Tout n’est pas rose pour autant

Mais, alors que depuis 1987 une prévention effective associée à des traitements a permis d’améliorer la prise en charge de certaines affections, d’autres maladies sont à leur tour devenues mortelles. La preuve en est, l’augmentation des lésions cérébrales dues au VIH chez les personnes survivantes à long terme atteintes par le VIH. Par ailleurs, alors que l’incidence de l’encéphalite à VIH a considérablement diminué autour de 1987, grâce à l’AZT, elle est restée stable tant que les personnes utilisaient cette molécule. On constate ces dernières années une reprise de cette atteinte neurologique, principalement chez les malades ne prenant plus d’AZT. En fait, les autopsies montrent que la fréquence de l’encéphalite à VIH a fluctué sans réellement diminuer depuis l’introduction du premier antirétroviral. Quoi qu’il en soit, le nombre de cas avec troubles cognitifs persistants demeure inchangé. En revanche, et heureusement, les fréquences de l’encéphalite à CMV et de la toxoplasmose ont nettement diminué, alors que celles des infections fongiques et du lymphome non-Hodgkinien ont continué de fluctuer considérablement. Enfin, la fréquence des atteintes neurologiques par les virus Herpès simplex et celle de la LEMP demeurent faibles depuis le début de l’épidémie. Allant dans le même sens, des études réalisées à San Diego et Vienne concluent que les atteintes du cerveau lors du sida sont toujours fréquemment retrouvées au cours des autopsies et ceci malgré les multithérapies. De plus, probablement lié à l’apparition de résistances virales aux antirétroviraux, un rebond du nombre d’encéphalite à VIH et en particulier d’une forme très dévastatrice de lymphome associé au VIH a refait son apparition ; autre modification associée à l’introduction des multitraitements, l’augmentation des lésions affectant la substance blanche du cerveau. Ainsi, indépendamment de la présence ou non d’une encéphalite à VIH, avant l’arrivée des antirétroviraux seulement 11 % des autopsies montraient une atteinte de la substance blanche, contre 26 % après l’introduction des multithérapies.

A retenir

Avant l’introduction des antirétroviraux, les infections fréquemment mises en cause étaient les cytomégalovirus, les LEMP, les lymphomes non-hodgkiniens, les encéphalites à VIH et la toxoplasmose. Si l’introduction des multithérapies a permis de diminuer l’incidence de ces infections, celle de l’encéphalite à VIH a augmenté.

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[1Et, ce faisant, cela a montré le bénéfice que pouvait représenter les antirétroviraux dans le traitement des neuropathologies dues au VIH.