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Assistance médicale à la procréation

jeudi 1er juillet 2004

Les 6 et 7 mai derniers se sont tenues les 3èmes journées nationales “ désir d’enfant et VIH ”. Presque trois années après l’entrée en vigueur de l’arrêté du 10 mai 2001 qui a permis aux couples séropositifs ou sérodifférents l’accès à l’assistance médicale à la procréation, il s’agissait de faire le bilan de la prise en charge de ces couples.

Est-ce que les centres fonctionnent de manière satisfaisante ? Est-ce que les techniques sont fiables et adéquates ? Est-ce que l’on obtient les résultats souhaités (absence de contamination du partenaire non-infecté et de l’enfant, grossesses) ? Etc. S’il est impossible de présenter une synthèse exhaustive de l’ensemble des interventions, il s’agit ici de dresser un rapide bilan de la prise en charge des couples dont l’un ou les deux sont séropositifs au VIH et/ou aux hépatites.

quel accès pour les couples ?

Pour pouvoir accéder à l’AMP, les couples doivent remplir un certain nombre de critères qui ont été posés par l’arrêté du 10 mai 2001. Ces critères leur sont rappelés lorsqu’ils rencontrent pour la première fois l’équipe de centre qui les prendra en charge :

 être un couple stable, marié ou ayant une vie commune depuis plus de deux ans ;
 participer à des entretiens avec les psychologues de l’équipe afin d’évaluer le projet d’enfant ;
 s’engager à avoir une sexualité systématiquement protégée durant toute la durée de l’AMP.

Lors de ce premier rendez-vous, on rappelle également aux couples qu’un risque résiduel de contamination (de l’enfant, de la femme) existe, même si aucun cas n’a été rapporté à ce jour. C’est la raison pour laquelle on leur propose des alternatives qui ne présentent aucun risque, comme l’insémination avec tiers donneur.

L’homme séropositif pour le VIH-1 doit en outre remplir les critères suivants :

 avoir un suivi régulier, traité ou non, sans maladie évolutive ;
 avoir des CD4 supérieurs à 200/mm3 à deux reprises dans les quatre mois précédents ;
 avoir une charge virale plasmatique stable, sans augmentation supérieure à 0,5 log pendant les quatre mois précédents.

La femme doit être séronégative pour le VIH dans les deux mois précédant la demande et au moment de la prise en charge. Elle aura par ailleurs un suivi sérologique à deux semaines, trois et six mois de grossesse ainsi qu’à l’accouchement.
La femme séropositive pour le VIH-1 doit remplir les critères suivants :
 avoir un suivi régulier, traitée ou non, sans maladie évolutive ;
 avoir des CD4 supérieurs à 200/mm3 à deux reprises dans les quatre mois précédents ;
 avoir une charge virale plasmatique stable, sans augmentation supérieure à 0,5 log dans les quatre mois précédents.

La prise en charge de la grossesse et de l’enfant à la naissance se fera par des équipes spécialisées.

quelles techniques de procréation ?

Lorsque l’homme est séropositif et la femme séronégative, il est nécessaire, afin d’éviter tout risque de transmission, de passer par une des techniques d’AMP. Au préalable, une recherche de virus se fera sur le sperme recueilli au laboratoire. Le sperme sera réparti en deux fractions, dont l’une sera immédiatement congelée, pour pouvoir être utilisée ultérieurement lors des gestes d’AMP. La seconde sera utilisée pour la recherche du virus : on effectue une charge virale sur le liquide séminal, puis sur les spermatozoïdes mobiles qui seront ensuite centrifugés et lavés. Une dernière charge virale sera effectuée sur cette fraction finale et la fraction congelée ne sera traitée à son tour puis utilisée que si la dernière charge virale est négative. Si elle est positive, cela ne signifie pas que le couple est exclu de la prise en charge, mais il faudra recommencer avec un nouvel échantillon de sperme.

Ensuite, l’équipe oriente le couple vers l’une des trois méthodes d’AMP : Insémination intra-utérines ou IIU ; fécondation in vitro ou FIV ; fécondation par micro-injection d’un spermatozoïde dans le cytoplasme ovocytaire ou ICSI), en fonction de l’évaluation de la fertilité et de la qualité du sperme.

Lorsque la femme est séropositive et l’homme séronégatif, la prise en charge débutera généralement par quelques tentatives d’auto-insémination (sauf s’il y a des contre-indications, telles que l’âge, des problèmes de fertilité, etc.).

Le moment adéquat correspond au dernier jour de température basse de la courbe thermique, entre le 12ème le 14ème jour pour un cycle de 28 jours. Le sperme est recueilli par l’homme, soit par masturbation (récipient propre, par exemple petits pots stériles à examen vendus en pharmacie), soit lors d’un rapport avec un préservatif spécial ne comportant aucun spermicide.

L’injection du sperme au fond du vagin doit se faire sans délai à l’aide d’une seringue ou d’une pipette en plastique, et la femme doit être couchée, avec le bassin légèrement surélevé. Il est également recommandé de garder cette position pendant une quinzaine de minutes.

Lorsque plusieurs tentatives d’auto-insémination ont été pratiquées sans succès ou lorsqu’il existe des contre-indications, l’équipe proposera une prise en charge en AMP. La technique utilisée dépendra en particulier du bilan de fertilité. Néanmoins, une autre donnée vient compliquer la prise en charge des couples dont la femme est séropositive.
En effet, les équipes tentent d’éviter les grossesses gémellaires, lesquelles ne sont pas souhaitables chez les femmes séropositives : du fait de l’augmentation des complications obstétricales, les grossesses gémellaires majorent le risque de transmission du VIH de la mère aux enfants. Une réflexion est donc entamée, pour adapter la prise en charge à ce risque supplémentaire (implantation d’un seul embryon, stimulations moins fortes, etc.).

Lorsque les deux membres du couple sont séropositifs, la prise en charge en AMP est proposée soit en cas d’infertilité au sein du couple, soit parce que le couple exprime le souhait de recourir à l’AMP pour ne pas remettre en cause une attitude de prévention systématique ou pour ne pas prendre le risque d’une surcontamination de l’autre partenaire. La technique proposée dépendra en particulier du bilan de fertilité.

quel bilan provisoire ?

Depuis l’entrée en vigueur de l’arrêté du 10 mai 2001, plus de 400 couples se sont adressés aux différents centres ayant mis en place des structures d’accueil de prise en charge des couples par AMP. La mise en place des activités d’AMP est trop récente pour faire un bilan complet et exhaustif, mais il est déjà possible d’affirmer que plus des 2/3 des couples peuvent espérer voir leur projet parental se réaliser et à ce jour, aucun cas d’infection de l’enfant n’a été rapporté.

Résultats de prise en charge des couples dont l’homme est séropositif : les résultats provisoires montrent un taux de réussite satisfaisant. Ainsi, à Cochin (à Paris), environ 150 couples ont été pris en charge (ce nombre inclut les couples pris en charge dans le cadre du protocoles NECO, voir protocoles n° 11), et la prise en charge a conduit à 86 grossesses, dont environ un tiers après un seul acte d’AMP. Pour l’instant, 35 enfants sont nés. De même, à Strasbourg, environ 60 couples ont été pris en charge, ce qui a permis d’obtenir près de 40 grossesses, dont environ la moitié après un seul geste d’AMP. Tous les enfants nés sont séronégatifs.

Résultats de prise en charge des couples dont la femme est séropositive :
Dans deux des principaux centres qui prennent en charge les femmes séropositives en AMP, 64 couples ont déjà eu au moins un cycle de traitement. A Cochin, 40 couples ont eu 56 cycles d’IIU et 22 cycles de FIV ou d’ICSI. 10 grossesses évolutives ont été obtenues (dont 2 gémellaires) et 6 enfants sont déjà nés. A Strasbourg, 24 couples ont eu 4 cycles d’IIU et 39 cycles de FIV, et 8 grossesses évolutives ont été obtenues, 7 enfants sont nés. Tous les enfants nés sont séronégatifs.

quels centres ?

La liste que nous donnons ici correspond aux centres qui ont fait une déclaration de fonctionnement pour le prise en charge en AMP de personnes séropositives et qui fonctionnent effectivement. D’autres centres prennent en charge uniquement les couples dont l’un ou les deux membres ont une hépatite. Pour se procurer la liste de ces centres, contactez-nous : traitements@actupparis.org.

En France :

 Lyon : CHU, Département de médecine de la reproduction, Hôpital Édouard Herriot, responsable : Dr Guérin, tél. 04 72 11 77 60 ;
 Marseille : Clinique Bouchard, responsable :
Dr Roulier, tél. 04 91 16 79 00 ;
 Nancy : CHU Unité d’AMP, clinique et biologique, Maternité régionale de Nancy, responsable :
Dr Barbarino, tél. 03 83 34 43 15 ;
 Paris : Hôpital Cochin, Hôpital St Vincent de Paul, Hôpital Necker, Centre d’AMP, responsable :
Pr Jouannet, tél. 01 58 41 15 41 ; Hôpital Pitié-Salpêtrière, Service AMP/ Maternité, responsable :
Dr Poirot, tél. 01 42 17 77 21 ; Paris Hôpital Bichat-Claude Bernard, Centre d’AMP, responsable :
Dr Devaux, tél. 01 40 25 88 84 ;
 Strasbourg : Centre médico-chirurgical et obstétrical SIHCUS, responsable : Dr Ohl, tél. 03 88 62 83 10 ;
 Toulouse : CECOS Midi-Pyrénées, Hôpital Paule de Viguier, responsable : Dr Bujan, tél. 05 67 77 10 17.

A l’étranger :

 Belgique : CHU St. Pierre, Service PMA, Rue haute 322, 1000 Bruxelles.
 Grande Bretagne : Chelsea & Westminister hospital, Assisted Conception Unit, 369 Fulham Road, London.

quelles conclusions ?

La prise en charge est un succès, spécialement pour les couples qui parviennent à réaliser leur désir d’enfant grâce à ces techniques. Plusieurs bémols cependant : certains couples ne peuvent pas avoir accès à ces techniques, en particulier parce qu’ils ne répondent pas aux critères virologiques ou biologiques, ou parce que les pays où ils vivent ne proposent pas l’accès à ces techniques, qui sont, on le sait, coûteuses et nécessitent déjà l’accès aux traitements ; les échecs de prise en charge existent et sont extrêmement difficiles à vivre pour les couples concernés ; certains médecins sont encore réticents à orienter les couples vers une prise en charge, en particulier lorsque la femme est séropositive. Ainsi, un des centres pourtant précurseur en la matière, l’hôpital de Toulouse, refuse pour l’instant de prendre en charge les femmes séropositives. Il reste donc encore du chemin à faire.