Accueil > Traitements Recherche > Guerre aux labos > 5 mars 2001 : journée mondiale de mobilisation contre l’industrie pharmaceutique

5 mars 2001 : journée mondiale de mobilisation contre l’industrie pharmaceutique

mars 2001

Une soixantaine de militants d’Act Up-Paris se sont rendus à la Défense le 5 mars 2001, haut lieu de l’Industrie Pharmaceutique, pour dénoncer la participation des laboratoires à la logique meurtrière du sida.

Act Up-Paris répondait, par cette action, à l’appel des activistes sud-africains de Treatment Action Campaign pour une journée mondiale de mobilisation contre l’industrie pharmaceutique.

Le 5 mars s’ouvrait à Pretoria le procès intenté au gouvernement sud-africain par une coalition de 40 laboratoires pharmaceutiques occidentaux. Son seul tort est d’avoir envisagé d’appliquer des dispositions légales des accords de l’OMC pour améliorer l’accès aux traitements contre le sida pour les 4,2 millions de séropositifs du pays.

Soucieux de préserver la rente que constitue pour eux l’épidémie de sida, les laboratoires du Nord cherchent à étouffer toute menace à leur suprématie et invoquent le droit international du commerce, quitte à le faire mentir. Pour eux, les 4,2 millions de séropositifs sud-africains ne sont pas des patients, mais une menace à leur monopole.

L’industrie pharmaceutique a une dette envers les malades du sida. Si elle amasse des profits faramineux sur le marché que constituent les pays occidentaux, elle ne peut ignorer que les produits qui assurent sa richesse ne sont pas de simples biens de consommation et que leur commerce doit répondre avant tout aux règles de la santé publique. En 2000, les ventes des médicaments anti-VIH de Glaxo-SmithKline (un des principaux laboratoires commercialisant des antirétroviraux) lui ont rapporté 1,6 milliard de dollars, soit le Produit Intérieur Brut du Tchad. Ses bénéfices nets, toutes pathologies confondues, sont de 4,7 milliards de $, soit le PIB du Sénégal.

Ces profits démesurés font de l’industrie pharmaceutique la plus rentable du monde. Pourtant, quels que soient ses objectifs économiques, elle ne peut se dédouaner des impératifs de santé publique et des exigences des malade.

Au Sud, des médicaments génériques à prix coûtant.

Les prix des médicaments de marque sont inaccessibles pour les pays du Sud. Pourtant les laboratoires ont toujours refusé d’adopter une véritable politique de tarifs différenciés. Malgré l’annonce fracassante faite par 5 laboratoires pharmaceutiques en mai dernier en partenariat avec ONUsida, les seules réductions tarifaires consenties concernent un nombre limité de molécules pour quelques centaines de malades dans 3 pays (Sénégal, Ouganda, bientôt le Rwanda) pour une durée limitée (5 ans). Par ces concessions mineures, les laboratoires occidentaux prennent en otage les gouvernements africains et parviennent à différer le développement des génériques, qui représente pourtant la seule perspective de mettre en place une véritable concurrence et d’obtenir des prix enfin adaptés.

Au Sud, les rares garde-fous prévus par les accords de l’OMC pour permettre l’accessibilité des médicaments sont inexploitables.

Les pays du Sud ne constituent pas un marché pour les laboratoires occidentaux. Et pourtant, ils multiplient les pressions pour empêcher le développement de productions de génériques et la pratique des importations parallèles.

Le Brésil et l’Inde produisent et vendent déjà des versions génériques de cinq médicaments antirétroviraux à des prix jusqu’à 30 fois inférieurs. Ainsi, le producteur indien Cipla propose une trithérapie à 350$ par an quand le même traitement coûte 10 400 $ aux Etats-Unis. Pour étouffer dans l’oeuf cette industrie prometteuse qui fait vaciller leur monopole, les industries pharmaceutiques multiplient les pressions et n’hésitent pas à bafouer les lois. Sous pression du lobby pharmaceutique, les USA intentent un procès au Brésil devant l’Organisation Mondiale du Commerce. Le 5 mars, une coalition de 40 industries pharmaceutiques attaquait en justice l’Afrique du Sud pour avoir envisagé d’utiliser la pratique légale des importations parallèles. Il faut modifier la lettre même des accords sur la propriété intellectuelle.

Au Nord, l’amélioration des traitements pour réduire leur toxicité.

Les effets indésirables des traitements ruinent la qualité de vie des malades. Pourtant, l’industrie pharmaceutique persiste à nier ces effets indésirables et refuse de travailler à l’amélioration de ces produits. La situation de monopole que leur confèrent les brevets leur épargne toute concurrence pendant 20 ans.

Au Nord, la mise à disposition précoce de nouvelles molécules pour les malades en échappement.

Entre 5 et 10% des malades du Nord ne sont plus suffisamment sensibles aux traitements disponibles sur le marché. Depuis deux ans, nous réclamons que les laboratoires mettent à disposition de ces malades en situation d’urgence les molécules en cours de développement dont l’efficacité est déjà prouvée. Jusqu’ici, ils n’ont cédé que quand nos exigences rencontraient leurs impératifs commerciaux.

Au Nord, les pouvoirs publics français comptaient sans doute sur les prix astronomiques consentis par la Sécurité Sociale pour obtenir des contreparties (réduction de la toxicité des médicaments et mise à disposition précoce de nouvelles molécules) d’entreprises qu’on aurait alors pu qualifier de " citoyennes ".

A l’échelle mondiale, les institutions internationales comptaient sans doute sur les privilèges accordés aux industries pharmaceutiques par la législation sur la propriété intellectuelle (monopole mondial de 20 ans), pour obtenir de celles-ci une tolérance vis-à-vis de productions - légales - de génériques indispensables à la survie des malades.

Les responsables politiques se sont trompés. Arc-boutés sur leurs privilèges et leurs monopoles, les industries pharmaceutiques ne feront aucune concession. Il ne faut pas attendre de leur part une attitude éthique, mais prendre les mesures coercitives qui s’imposent. Il ne s’agit pas de convaincre les laboratoires mais de les contraindre.

Ces profits démesurés font de l’industrie pharmaceutique la plus rentable du monde. Encore une fois, quels que soient ses objectifs économiques, elle ne peut pourtant se dédouaner des impératifs de santé publique et des exigences des malades.

Après avoir fait du profit sur nos vies pendant 15 ans, il faut désormais que les laboratoires payent leur dette.

Nous leur ferons payer leur dette.
Nous fermerons leurs usines.
Nous boycotterons leurs produits.
Nous ruinerons leur image de marque.

Act Up-Paris exige :
 des pouvoirs publics français : qu’ils se dotent de l’arsenal juridique nécessaire afin de juguler le pouvoir absolu des laboratoires dans l’intérêt des malades ; qu’ils dénoncent l’attittude des compagnies pharmaceutiques en Afrique du Sud et soutiennent publiquement les actions des gouvernements brésilien et sud-africain
 des institutions internationales : qu’elles abolissent les brevets partout où ils tuent.

Act Up-Paris exige des industriels du sida :
 qu’ils mettent à disposition immédiatement les molécules en développement pour les malades en situation d’urgence
 qu’ils réduisent la toxicité de leurs médicaments
 qu’ils vendent à prix coûtant les antirétroviraux aux pays du Sud, sans aucune contrepartie et sans aucune limitation de volume ni de durée
 qu’ils cessent leurs pressions sur les pays qui tentent d’avoir recours aux médicaments génériques.