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Sida en Afrique, Coca-Cola laisse mourir ses employés

lundi 14 octobre 2002

Une coalition internationale d’activistes mobilisés contre le sida - de Hararé à Paris, de Casablanca à Atlanta, De Bangkok à New York - organise les 16 et 17 octobre 2002 des actions simultanées de protestations contre Coca-Cola. Cette coalition exige de Coca-Cola et des autres multinationales implantées dans les pays en développement qu’elles assurent la prise en charge médicale de tous leurs employés séropositifs.

Coca-Cola est la plus grosse multinationale implantée en Afrique, 100 000 personnes travaillent à la promotion, la mise en bouteille ou la distribution de produits Coca-Cola (Coke, Fanta, Sprite, Nestea, etc.). Parmi ces employés de nombreuses personnes sont séropositives et ont besoin d’accéder à des traitements pour rester en vie.

L’annonce récente de Coca-Cola

Sous la pression de la campagne activiste internationale, le 29 septembre 2002, Coca-Cola annonçait le lancement d’une initiative de partage des coûts avec ses sous-traitants pour développer l’accès aux soins.
Coca-Cola reconnaît ainsi sa responsabilité dans la prise en charge médicale des personnes séropositives travaillant à la mise en bouteille de ses produits.
Pourtant, dans les faits, la compagnie refuse toujours de permettre un accès équitable aux traitements pour l’ensemble de ses employés et de leurs proches.

En effet, nombre d’incertitudes demeurent quand à l’efficacité, l’étendue, la rapidité de mise en oeuvre et la pérennité de l’initiative. En outre, compte tenu des conditions prévues par cette initiative, il est clair que la majorité des personnes qui travaillent pour Coca-Cola ne pourront accéder aux traitements :

 L’initiative de Coca-Cola ne concernera que 35% de ses employés. En effet, elle ne s’applique qu’à 8 des 40 entreprises de mise en bouteille qui travaillent pour la multinationale. Il s’agit en général de grosses entreprises qui disposent déjà d’une politique d’assurance pour leur personnel. Par contre, la majeure partie des employés travaillant dans de petites structures dans les régions les plus touchées par le sida ne bénéficiera pas elle d’une prise en charge médicale.

 Coca-Cola déclare s’engager à couvrir 50% des coûts de la prise en charge médicale, 40% revenant aux sous-traitants, 10% à l’employé lui-même.
Pourtant, il est évident que ce modèle ne pourra s’appliquer de la même façon à toutes les entreprises. Les plus petites d’entre elles ne pourront en effet supporter les coûts de cette prise en charge.

 Coca-Cola impose à ses employés de participer à hauteur de 10% au financement de l’accès aux médicaments. La majorité des employés ne bénéficiant pas d’assurance maladie et/ou ayant des salaires très bas sera ainsi exclue de l’accès aux médicaments. Coca-Cola pourrait pourtant très facilement prendre en charge la totalité du financement qui ne représente pour la compagnie qu’une dépense marginale.

 Par ailleurs Coca-Cola ne s’engage pas à faire jouer la compétition entre les producteurs de médicaments, notamment en recourrant aux génériques. Au contraire Coca-Cola annonce un partenariat avec GlaxoSmithKline et PharmAccess International (regroupement de 5 multinationales pharmaceutiques). L’intérêt des malades ou des sous-traitants impliqués dans le financement des médicaments serait pourtant de recourir aux produits les moins cher.

 L’initiative de Coca-Cola exclut la prise en charge médicale de la cellule familiale hormis l’épouse, condamnant ainsi à mort les enfants ou les autres conjoints.

 L’initiative de Coca-Cola ne concerne que l’Afrique. Pourtant, tous les employés de Coca-Cola travaillant dans les régions les plus touchées par le sida doivent avoir accès aux médicaments.

Engagement du secteur privé dans l’accès aux antirétroviraux dans les pays en développement

S’il incombe avant tout aux pouvoirs publics d’assurer l’accès à la santé publique pour le plus grand nombre, et de mettre tout en oeuvre pour permettre la prise en charge médicale des personnes atteintes par le sida, le secteur privé ne peut refuser de s’impliquer.

Chaque jour, 10 000 personnes atteintes du sida meurent parce qu’elles n’ont pas eu accès aux médicaments qui permettent aux malades dans les pays riches de rester en vie.

L’épidémie de sida décime les populations de nombreux pays, ébranle leurs économies. Les multinationales implantées dans ces pays et qui tirent des bénéfices du travail des populations locales ont une responsabilité à assumer. Il est de leur devoir de systématiquement s’engager à financer la prise en charge médicale de leurs employés séropositifs.

Par ailleurs, des études ont prouvé que ces entreprises ont tout intérêt d’un point de vue économique a assurer le maintient en bonne santé de leurs employés, notamment par la prise en charge antirétrovirale des personnes séropositifs [1].

Dans les pays en développement les plus touchés par l’épidémie, les ouvriers constituent une proportion importante des personnes contaminées. Le Bureau Internationale du Travail (BIT) estime que 20 millions de personnes atteintes sont des ouvriers, soit la moitié des personnes contaminées dans le monde. Or ces personnes ne disposent pas des moyens financiers leur permettant d’accéder aux traitements antirétroviraux contre le sida.

Alors que la communauté internationale porte de plus en plus d’attention à la pandémie et que l’engagement politique des dirigeants des pays industrialisés et des pays en développement s’intensifie, les grandes entreprises ne cessent d’annoncer de nouvelles initiatives destinées à combattre le fléau mondial. Pourtant, la plupart des multinationales implantées dans les pays en développement ignorent encore le droit fondamental de leurs employés séropositifs à avoir accès à des traitements et des soins abordables leur permettant de rester en vie.

En août dernier, sous la pression des syndicats et des activistes, les compagnies minières Anglo American, Anglo Gold et De Beers, acceptaient d’assurer la prise en charge médicale de leur employés, incluant la mise sous antirétroviraux.

De son côté Coca Cola fait partie des multinationales qui tirent le plus de profits du marché africain et refuse toujours d’assurer l’accès aux soins et aux traitements pour l’ensemble de ses employés en Afrique.

Coca-Cola se soustrait à ses responsabilités tout en faisant un maximum de bénéfices sur le continent Africain. Pourtant cette compagnie pourrait éviter, à peu de frais, nombre de futures contaminations et de décès. Face à une catastrophe sanitaire sans précédent, Coca-Cola doit assurer que tous ses employés séropositifs et leurs proches puissent avoir accès aux traitements et soins appropriés.

Nous exigeons de Coca-Cola, ainsi que des autres multinationales implantées dans les pays en développement :

 Qu’elles donnent accès aux soins et aux traitements nécessaires à l’ensemble de leurs employés séropositifs ainsi qu’aux familles de ceux-ci.

 Qu’elles donnent accès au dépistage anonyme et gratuit à tous leurs employés.

 Qu’elles mettent des préservatifs à disposition sur les lieux de travail et instaurent une politique d’information et d’éducation sur le sexe sans risque et la santé sexuelle.

 Qu’elles développent des politiques de prévention et d’éducation en collaboration avec les employés affectés, les représentants syndicaux et les initiatives communautaires locales.

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 16-17 octobre 2002 : actions et protestations mondiales contre Coca-Cola
 ce que nous reprochons à Coca-Cola
 Coca-Cola fait de gros bénéfices grâce aux travailleurs africains
 Une campagne d’ampleur internationale
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 nos précédents articles sur Coca-Cola


[1Voir notamment l’étude Impact socio-économique du sida et de investissement dans la prise en charge antirétrovirale d’une compagnie privée à Abidjan, Côte d’ivoire, réalisée par S.P. Eholi, E. Bissagnégné, A. Gaumon, J. Mambo, J. Guiza, A. Kakou, A. Kadio, Unité des maladies Infectieuses de l’hôpital de Treichville, Compagnie Ivoirienne d’Electricité, présentée lors de la Conférence Internationale sur le Sida à Barcelone en Juillet 2002

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