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Avancées sur la PrEP, et maintenant ?

vendredi 31 octobre 2014

Act Up-Paris a accueilli avec beaucoup d’intérêt les récentes décisions des comités indépendants des essais de prophylaxie pré-exposition (PrEP) Proud au Royaume-Uni et Ipergay en France et au Canada de mettre fin à la phase comparative et d’ouvrir l’accès au Truvada en PrEP à tous les participants en ce qu’elles constituent une avancée décisive vers l’usage de cette nouvelle stratégie de prévention mais aussi parce qu’elles démontrent l’importance de la protection des personnes et du respect des conditions éthiques dans ce type de recherche.

L’essai Ipergay, remodelé, doit se poursuivre. A présent que la preuve de l’efficacité de la PrEP prise en intermittence est jugée suffisante, l’essai doit prendre la forme d’une recherche opérationnelle d’importance capitale. D’une part, il doit permettre de définir les dispositifs les plus adaptés à la mise à disposition de PrEP en intermittence, notamment en termes de dépistage, de prise en charge des IST, d’orientation vers les autres moyens de prévention, de counseling. D’autre part, il doit servir de cadre à des études comportementales qui permettront d’évaluer les effets de la mise à disposition de PrEP en intermittence sur les comportements de prévention des gays et autres HSH (hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes).

En dehors du cadre de l’essai, la PrEP peut à présent être regardée comme un outil intéressant de prévention. L’intégration de cet outil aux dispositifs de prévention n’est en rien un changement de paradigme : la PrEP ne s’adresse guère qu’à ceuxLLES qui se montrent intéresséEs par cette stratégie, dont rien n’indique qu’ilELLEs soient majoritaires parmi les minorités les plus touchées par l’épidémie. Il n’est donc aucunement question de tourner le dos aux outils de prévention d’ores et déjà disponibles, comme le préservatif. Bien au contraire, il est plus que jamais nécessaire de renforcer toutes les autres dimensions des politiques de prévention et de dépistage, dont les insuffisances sont notoires. Multiplier les actions de promotion de la capote, élargir et consolider l’offre de dépistage, lutter contre les violences et discriminations sont autant de nécessités en matière de prévention, que les dernières avancées scientifiques n’abolissent pas.

L’intégration de la PrEP à la palette des outils disponibles en matière de prévention ne doit pas être faite à l’aveuglette. Bien au contraire, elle doit prendre place dans des dispositifs coordonnés de prévention et de dépistage, qui sont indispensables, au niveau individuel comme au niveau collectif, pour les premiEREs concernéEs. Des centres de santé sexuelle doivent ainsi être mis en place, en lien avec les communautés concernéEs, pour permettre l’accès à la PrEP de ceuxLLES qui le souhaiteront dans les meilleures conditions, auprès de médecins forméEs, mais aussi pour favoriser l’accès à tous les dispositifs de prévention du VIH et des IST ainsi qu’à leur dépistage et à la prise en charge la plus précoce des infections. Les effets à long terme des traitements sont mal connus : il faut donc construire des outils de suivi des effets indésirables, sur le modèle de ceux qui existent déjà pour les séropositifVEs sous traitement.
L’inclusion de la PrEP dans le champ de la prévention pose, qu’on le veuille ou non, la question du coût élevé des traitements. C’est pourquoi, plus que jamais, il est nécessaire d’agir pour réduire le prix des médicaments, au bénéfice de touTEs, séropositifVEs comme séronégatifVEs.

L’expérience américaine de l’usage de la PrEP, enfin, montre que parmi les personnes intéressées se trouve un nombre élevé de femmes. Les spécificités des effets des traitements chez les femmes séropositives sont souvent dédaignées dans la recherche médicale existante. Tout comme les effets sexospécifiques des traitements chez les femmes séropositives doivent devenir un enjeu capital dans la recherche, et l’inclusion des femmes dans les essais thérapeutiques être encouragée, l’efficacité des différentes stratégies de PrEP – en prise continue ou intermittente – doit être évaluée, et leurs effets indésirables spécifiques aux femmes être étudiés.