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Sida : Hollande et Canfin doivent voter contre le plafonnement de la lutte

mardi 13 novembre 2012

Mercredi 14 novembre le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme ouvrira son 28ème Conseil d’Administration à Genève. Des décisions historiques y seront prises. Les associations françaises appellent la France à voter contre la proposition d’instaurer des plafonds limitant le nombre de malades pouvant désormais être soignés par pays. Pascal Canfin et François Hollande doivent se mobiliser personnellement contre une telle décision.

LE PLAFONNEMENT DE LA LUTTE

Jusqu’ici, lorsque le Fonds mondial jugeait pertinent le programme de lutte contre les pandémies d’un pays pauvre, ce pays voyait son programme financé par le Fonds mondial. Lorsque le Fonds n’avait pas assez d’argent pour financer toutes les demandes de subvention, il finançait intégralement les demandes les plus prioritaires, et ensuite tentait de trouver des ressources additionnelles pour financer les demandes restantes.

Pendant 10 ans, ce système a fonctionné parfaitement : aucun pays ne s’est jamais vu débouté par le Fonds mondial pour manque d’argent. Les seuls pays déboutés furent ceux dont le programme sanitaire n’était pas jugé suffisamment crédible ou efficace, et cette décision était prise par un groupe d’experts en santé publique, complètement indépendants du Fonds. Cette politique de sélection des programmes prioritaires et de leur financement intégral découlait des engagements pris par les dirigeants du G8 dans les années 2000. En effet, ce sont les dirigeants du G8 qui créèrent le Fonds mondial au sommet de Gênes en 2001, et qui, au sommet de Gleneagles en 2005, s’engagèrent en faveur de l’accès universel au traitement anti-sida. En 2012, ces 8 pays concentrent encore à eux seuls plus de la moitié de la richesse mondiale [1].

La proposition soumise au CA du Fonds mondial cette semaine [2] aura pour absurde conséquence d’entraver la montée en puissance des programmes les plus efficaces de lutte contre les pandémies, au lieu de la soutenir intégralement comme par le passé.

Le Fonds mondial utiliserait désormais une formule mathématique pour calculer administrativement le « montant idéal » que chaque pays pauvre devrait recevoir par programme. Or, la base de calcul retenue pour cette formule aboutit à ce que ces plafonds de financement soient 2 à 3 fois inférieurs aux sommes dont un pays à besoin pour atteindre l’accès universel au traitement, objectif majeur de la communauté internationale en matière de lutte contre le sida [3]
. La formule va jusqu’à prévoir que, si un pays pauvre trouve des sommes supplémentaires en dehors du Fonds mondial, ces sommes soient retranchées de l’enveloppe à laquelle il aurait eu droit autrement. Un tel changement de méthode dans le mode de financement revient de fait à empêcher les pays pauvres de mettre en oeuvre des programmes de lutte contre les pandémies à hauteur des besoins des malades.

Il revient aujourd’hui aux associations de lutte contre le sida de dénoncer haut et fort le coût humain des décisions proposées au CA du Fonds
mondial : plafonner d’office les sommes que le Fonds mondial peut apporter à chaque pays pauvre, c’est condamner des centaines de milliers de malades du sida, auxquels la communauté internationale a pourtant promis un traitement.

LES ENGAGEMENTS DU GOUVERNEMENT

En juillet dernier, François Hollande avait créé l’évènement durant la conférence mondiale sur le sida. Réunis à Washington, les scientifiques du monde entier démontraient que pour la première fois l’Humanité avait les moyens techniques de débarrasser la planète du sida. François Hollande avait alors déclaré devant les conférenciers [4] : « Arrêter l’épidémie de sida dans le monde, c’est possible. C’est la solidarité entre les Nations qui est en jeu, ce qui suppose l’implication des pays les plus riches envers les plus démunis. C’est grâce à cet engagement que nous parviendrons à traiter non seulement 7 millions de personnes, mais 15 millions de malades du sida. La France est le deuxième contributeur financier du Fonds mondial et elle entend poursuivre sa participation. ».

En tant que deuxième financeur du Fonds mondial, engagé en faveur du doublement du nombre de malades traités de 7 à 15 millions, la France doit s’opposer à l’instauration de plafonds au Fonds mondial. Ce plafonnement est incompatible avec les objectifs sanitaires affichés. Le système actuel doit être conservé. Le Fonds mondial doit poursuivre le financement intégral des programmes de lutte contre les pandémies du plus grand nombre de pays possible, et rechercher des financements supplémentaires pour les autres.

C’est pourquoi les associations appellent Pascal Canfin et François Hollande à intervenir personnellement pour assurer la cohérence entre l’action et les discours du gouvernement, et à veiller à ce que la France vote contre l’instauration de plafonds mortifères au Fonds mondial.


[2La proposition d’instaurer des plafonds au Fonds mondial est contenue dans le document ’GF/B28/2/Evolving_The_Funding_Model’ diffusé il y a 10 jours par le Fonds mondial. Il s’agit du Point de Décision n°1, situé en page 12 du document. Par contraste, le Point de Décision n°2, situé en page 20 de ce document, doit être soutenu. En effet, il vise à augmenter en urgence les subventions existantes du Fonds mondial, afin de compenser les dommages sanitaires causées par la décision, prise par le CA en décembre 2011, d’annuler le 11ème Cycle de financement du Fonds mondial (la France s’était alors honorée, en s’opposant à l’annulation de ces financements).

[3Voir la Déclaration Politique de l’ONU contre le VIH/sida, juin 2011 : http://www.unaids.org/en/media/unaids/contentassets/documents/document/2011/06/20110610_UN_A-RES-65-277_en.pdf