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Edito

octobre 2009

Le 3 octobre nous nous sommes retrouvéEs à 200 sous le dôme du siège du Parti Communiste pour assister à la rencontre organisée par l’interassociatif Femmes & VIH afin de réfléchir à la question de la visibilité des femmes séropositives.

Parmi nous, Marie-George Buffet, en tant que Présidente du groupe sida à l’Assemblée nationale, et qui nous soutient depuis que nous l’avons rencontrée en 2008 pour lui faire part des revendications émises lors du Colloque organisé en 2007 sur la question des femmes séropositives.
Encore dans l’enthousiasme de se retrouver une nouvelle fois ensemble, nous avons assisté à une plénière aussi émouvante que mobilisante. Etre accueilliEs de la sorte par Marie-George Buffet et les femmes militantes de la lutte contre le sida et pour le droit des femmes, a été incroyablement fort. Elles nous ont rappelé les raisons de nos engagements et les objectifs de cette journée : réfléchir à des revendications afin de changer les choses.

Le sujet de la visibilité, ou de l’invisibilité des femmes séropositives, comme beaucoup d’autres domaines connaît un retard relatif. Si certainEs ont pu trouver dans les revendications énoncées en fin de journée un signe de régression, nous ne partageons pas cet avis, bien au contraire. Tout au long de la rencontre, les femmes présentes ont fait part de leur désir d’être entendues, reconnues, respectées, s’interrogeant sur les raisons pour lesquelles nous étions enfermées, cachées dans ces salles au lieu de témoigner plus largement à l’extérieur. « Les publications distribuées dans le hall, devraient se trouver dehors à la disposition des passants et nous avec » a même proposé une femme. La volonté de se montrer et de faire entendre notre parole, sans que celle-ci ne soit modifiée, censurée, tronquée par des journalistes habitués à ce genre de pratique, est revenu comme un refrain tout au long de la journée. Réparties en 5 ateliers, les femmes ont réfléchi à la question : qu’est-ce qui doit changer pour que l’on puisse en parler à son partenaire ; à son entourage professionnel ; à son entourage familial ; au milieu médical et aux médias ?

Ce qui en ressort c’est le terrible écart qui existe entre partager les moyens de se préserver et la fuite immédiate de son partenaire une fois le mot « séropositive » prononcé, entre le soutien de ses collègues et la « dénonciation » par le médecin du travail, entre vivre en famille et subir l’eau de javel qui désinfecte, entre le gynécologue idéal et les refus de soins, entre l’interview respectueux et les propos échappés qu’on a voulu taire mais qui font l’objet unique de l’article final.

Ce qui est sûr, c’est que le temps nous a manqué. Un après-midi pour faire le tour de la question est trop peu quand il y a tant à dire. La question de la visibilité a été l’un des premiers combat des militants d’Act Up. À l’époque l’invisibilité des personnes qui mouraient du sida arrangeait tout le monde, société, médias, politiques. Le sida ne concernait que les autres ! Une fois visible, nous devenions des interlocuteurs, et peu à peu nous étions considéréEs, en tout cas nous cessions d’être ignoréEs. Cette place, les femmes ne l’ont jamais vraiment atteinte. L’épidémie s’est peu à peu féminisée, et aujourd’hui les femmes sont majoritairement contaminées, mais sans pour autant être considérées. Toute la difficulté réside dans le fait que maintenant que les femmes s’engagent plus fortement dans la lutte contre le sida, pour elles-mêmes tandis que la société, les médias, les politiques, s’en fichent. La question de la visibilité est donc tout aussi cruciale qu’au début de l’épidémie.