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Conférence internationale de Mexico

Kouchner et Joyandet : des mensonges au lieu d’une véritable politique de lutte contre le sida

dimanche 3 août 2008

Act Up-Paris dénonce la communication mensongère du Ministère des Affaires étrangères (MAE) qui affirme que « la France joue un rôle majeur dans l’accès universel aux traitements et dans la prévention du Sida (sic) puisqu’elle y consacre chaque année 360 millions d’euros. » [1].

Cette communication est mensongère pour deux raisons : tout d’abord, le montant avancé par le MAE est gonflé de 75% (voir encadré). Surtout, loin de jouer un rôle majeur, la France de Nicolas Sarkozy a considérablement réduit la part de la France dans l’effort des nations du monde entier pour stopper l’hécatombe planétaire du sida.

Mensonges sur les chiffres

Le MAE avance le chiffre de 360 millions d’euros de montant de contribution à la lutte mondiale contre le sida, mais ne justifie pas ce chiffre. Les associations demandent au ministère d’expliquer à quelles dépenses correspondent ce montant depuis décembre 2007. Le 19 juin 2008, Alain Joyandet, Secrétaire d’Etat chargé de la Coopération et de la Francophonie, avait demandé à son directeur de cabinet Jean-Marc Châtaigner de répondre officiellement à la demande des associations, en présence d’Oxfam, DATA et Act Up-Paris. Nous n’avons reçu aucune réponse. D’après les chiffres officiels publiés par les pouvoirs publics, le montant réel de la contribution française à la lutte mondiale contre le sida est inférieur à 205 millions d’euros (voir encadré).

Mensonges sur les engagements

Aux sommets du G8 de juillet 2007 et juillet 2008, Nicolas Sarkozy s’est engagé en faveur de l’accès universel au traitement du sida d’ici 2010 [2]. D’après l’ONUSIDA, cela implique le triplement du nombre de malades sous traitement dans les pays pauvres, à 10 millions de personnes.

Or, la France a annoncé en septembre 2007 qu’au contraire de tripler sa contribution annuelle au Fonds mondial entre 2007 et 2010, celle-ci serait en réalité gelée à 300 millions d’euros pour les années 2007, 2008, 2009 et 2010. Jusqu’ici, la contribution de la France au Fonds mondial avait été multipliée tous les deux ans : multipliée par trois en 2003 (de 50 à 150 millions d’euros), et multipliée par deux en 2005 (de 150 à 300 millions). Les Etats-Unis, eux, ont annoncé le doublement de leur budget pour la lutte mondiale contre le sida, de 4 milliard d’euros par an en 2008 à 8 milliards d’euros en 2010 (ces chiffres figurent dans la loi reconduisant le programme PEPFAR, votée par le Congrès le mois dernier). D’après l’OCDE, l’économie française représente un septième de l’économie américaine : la France devrait donc contribuer au moins pour 1 milliard d’euros en 2010.

Act Up-Paris appelle les médias à rectifier les informations mensongères propagées par le Ministère des Affaires étrangères.


Total des contributions officielles de la France à la lutte contre le sida : 204,5 millions d’euros par an, soit :

 Fonds mondial : 150 millions d’euros pour la lutte mondiale contre le sida, sur une contribution globale de 300 millions d’euros par an
(source : www.theglobalfund.org)

 Agence française de Développement : 20 millions d’euros pour la lutte mondiale contre le sida, sur 50 millions d’euros en tout pour la santé
(source : chiffres donnés oralement par Marie-Odile Waty dans une réunion sur la stratégie santé de la France.)

 Fonds européen de Développement : 12 millions d’euros par an de la France pour la lutte mondiale contre le sida, sur une contribution globale de 820 millions d’euros pour 2009, dont 3% pour la santé, et 1,5% pour la lutte mondiale contre le sida.
(source : www.concordeurope.org / www.senat.fr)

 Budget santé Fonds de Solidarité Prioritaire du MAE + Aide technique en nature + contributions à l’OMS et ONUSIDA + ESTHER + Recherche = 30 millions d’euros par an pour la santé au Sud, soit 20 millions d’euros pour la lutte mondiale contre le sida ;
(source : www.diplomatie.gouv.fr/)

 Banque mondiale/International Development Agency (prêts) : 2,5 millions d’euros de contribution française à la lutte mondiale contre le sida, sur 50 millions d’euros de prêts en santé par an au global, dont proviennent 5% de la France ;
(source : worldbank.org/ID)

Quand à UNITAID : selon l’OCDE et le MAE, la contribution française à UNITAID provient d’une taxe para-fiscale payée par les passagers aériens français directement à UNITAID, et ne constitue donc pas de l’Aide Publique au Développement.



[1Voir le communiqué de presse du MAE : La France et la lutte contre le Sida (31 juillet 2008).

[2Voir le compte rendu de la conférence de presse de Nicolas Sarkozy au sommet du G8. Toyako - Mardi 8 juillet 2008 :
« Nous avons réaffirmé les engagements pris à Gleneagles en 2005 : 50 milliards de plus par an pour l’aide d’ici à 2010 dont 25 milliards pour l’Afrique, l’accès universel au traitement des grandes pandémies d’ici 2010. Nous avons réaffirmé l’engagement de 60 milliards de dollars pour la santé et vous savez que la France en avait fait une priorité. Nous avons convenu, plutôt que de faire de nouvelles promesses, qu’il fallait respecter scrupuleusement les engagements que nous avions pris. »