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Des projets de remise en cause de l’Aide Médicale de l’Etat dangereux et irresponsables

mardi 22 janvier 2008

Selon Le Figaro du 17 janvier dernier [1], le Ministère de la Santé envisagerait de remettre en cause l’Aide Médicale de l’Etat (AME) sous sa forme existante en instaurant un ticket modérateur sur les soins.

Act Up-Paris dénonce un tel projet qui exclurait des milliers de sans-papierEs des soins et empêcherait de nombreuxSES séropositiVES d’accéder à un traitement.

Quelques précisions sur l’AME

Contrairement à ce qu’écrit Le Figaro, l’AME ne concerne pas « les étrangers en situation irrégulière, présents sur le territoire français depuis plus de trois mois » : elle concerne ces derniers s’ils gagnent moins de 606 euros par mois [2]. Les bénéficiaires de l’AME sont des personnes étrangères en situation irrégulière vivant en dessous du seuil de pauvreté.

L’article parle ensuite de dépenses qui auraient « explosé » depuis la création du dispositif en 2000, évoquant notamment le chèque de 900 millions fait par l’Etat à la Sécurité Sociale. Cette somme n’est que le résultat de la sous-dotation systématique du budget voté pour l’AME depuis sa création en 2000, budget qui n’a jamais correspondu aux besoins. Quant à l’augmentation annuelle du budget, elle n’est que le réajustement des sommes consacrées à l’AME aux dépenses réelles.

En ce qui concerne la constante augmentation des bénéficiaires, elle ne correspond qu’à la montée en charge d’un dispositif relativement récent dont sont loin de profiter touTEs les potentielLEs titulaires, si l’on en croit le chiffre avancé par le gouvernement de 300 000 personnes en situation irrégulière.

Enfin, n’en déplaise à Thierry Mariani, les bénéficiaires de l’AME n’ont pas des dépenses démesurément plus élevées que celles des autres assurés sociaux. Au vu de la moyenne des visites en médecine de ville, du montant des dépenses moyennes (1808 € pour les bénéficiaires de l’AME contre un peu moins de 1768 € pour les assurés du régime général) [3], de leur recours plus systématique aux médicaments génériques que les assurés du régime général - et ceci compte tenu des besoins médicaux de la population concernée par l’AME : surreprésentation des séjours hospitaliers pour VIH, tuberculose et hépatite C - les bénéficiaires de l’AME ne sont pas les consommateurs de soins irresponsables que se complaît à imaginer le député du Vaucluse.

Attaquer l’AME : un désastre pour la santé publique

Imposer une charge financière supplémentaire pour accéder aux soins à des personnes en situation irrégulière vivant sous le seuil de pauvreté reviendrait concrètement à les exclure du système de soins. Outre les conséquences dramatiques que cela aurait en termes de santé publique, cela augmenterait considérablement les dépenses publiques : des pathologies bénignes non traitées dégénéreront en complications graves, dont la prise en charge s’avérera d’autant plus coûteuse. En matière de sida, une telle mesure freinerait l’accès au dépistage. Cela se traduirait par une reprise de l’épidémie dans une population déjà 19 fois plus touchée que la population générale [4].

Attaquer l’AME : l’égalité d’accès aux soins bafouée

Les assurés sociaux qui remplissent les mêmes conditions de ressources que les bénéficiaires de l’AME ont accès à la CMU complémentaire, qui prend en charge le ticket modérateur. La mise en place d’un forfait sur l’AME serait donc créatrice d’une inégalité, fondée uniquement sur la régularité du séjour, et ce alors que sont garantis par les textes constitutionnels et internationaux un accès effectif et une égalité de touTEs devant les soins.

Un dispositif déjà précaire et insuffisant

L’AME ne permet qu’un relatif accès aux soins, mais ne constitue pas une véritable couverture maladie. Non affiliées à l’Assurance maladie, ces personnes ne disposent pas de carte Vitale et l’AME ne comprend pas les majorations prévues par la complémentaire CMU en matière de lunettes, de prothèses dentaires et autres dispositifs médicaux à usage individuel. Enfin de nombreux médecins [5] refusent de prendre en charge les bénéficiaires de l’AME.

Act Up-Paris exige :

 l’abandon immédiat de tout projet visant à la mise en place d’un forfait à la charge des bénéficiaires de l’AME ;

 la CMU pour touTEs, avec ou sans papiers ;

 des engagements fermes de la part de Roselyne Bachelot-Narquin pour l’accès aux soins des sans-papierEs et son amélioration.


[2Plafond de ressources pour une personnes seule

[4Ibid.

[5Voir notamment les enquêtes de Médecins du Monde et du fonds CMU de 2006