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Pour l’Elysée, y a-t-il de bons et de mauvais malades du sida ?

Lettre ouverte à Nicolas Sarkozy

mardi 24 juillet 2007

Monsieur le Président,

Ce matin lors de votre conférence de presse à l’Elysée, vous avez dit « comprendre l’émotion » des enfants libyens de Bengazi malades du sida. Vous avez dit votre souhait que ces malades soient « soignés et accompagnés ». Vous avez assuré comprendre « la douleur qu’une telle maladie peut représenter ». Le 13 juillet dernier déjà, lors de son déplacement en Libye, votre épouse avait « promis un appui médical et des facilités pour l’obtention de visa pour les familles qui désirent soigner leurs enfants en France ».
Act Up-Paris se réjouit à la fois de la libération des infirmières bulgares et de la sollicitude manifestée par la France envers les enfants libyens de Bengazi. Mais en tant qu’association de malades, au regard de la politique que vous menez en France à l’encontre des personnes atteintes par le VIH, nous sommes désormais en droit de nous poser une question : pour l’Elysée, il y a de bons et de mauvais malades du sida ?

En France, en effet, l’accès aux soins des malades se dégrade, les cas d’étrangerEs malades expulséEs ou misES en rétention se multiplient au mépris de la loi, l’obtention d’une carte de séjour pour soins relève de plus en plus du parcours du combattant.

Depuis le début de cette année 2007, l’Observatoire du droit à la santé des étrangers (ODSE) a eu connaissance du renvoi forcé de nombreuses personnes, malgré les avis des médecins inspecteurs de santé publique, ainsi que de mises en rétention abusives :

 Début juin, deux étrangers séropositifs au VIH ont été placés en rétention en vue de leur expulsion du territoire. Originaires d’Afrique sub-saharienne, ces deux personnes ne peuvent avoir accès à un traitement approprié dans leur pays d’origine et leur expulsion les aurait condamnées à mort. La préfecture du Val-de-Marne, responsable de leur placement, était parfaitement au courant de leur état de santé. Néanmoins, cinq jours d’interventions ont été nécessaires pour obtenir leur libération.

 Lundi 18 juin, après 13 jours de rétention, un étranger souffrant d’une hépatite C active a été expulsé malgré un avis du médecin de l’administration indiquant que son état de santé nécessitait des soins en France, un certificat concordant de son médecin traitant et de nombreuses interventions de nos associations auprès des administrations compétentes.
(source : ODSE www.odse.eu.org)

D’autres cas peuvent également être évoqués :
 Madame Boztroprak, atteinte d’une grave maladie et sa fille Elmaz, qui résidaient à Angers ont été expulsés le 16 mars dernier vers la Turquie.
(Source : RESF www.educationsansfrontieres.org)

Le droit aux soins des étrangerEs est un principe inscrit dans la loi, et les « visas » pour séjour pour soins relèvent de ce droit . Ces « visas » ne doivent pas être des oboles humanitaires distribuées à la discrétion d’une « first lady » médiatique.

Dans sa déclaration, Cecilia Sarkozy évoque également le cas des familles de malades. Là encore, tandis que votre épouse semble au fait de la nécessité pour unE malade d’être entouréE de sa famille pour mener à bien son traitement, le gouvernement discutera en septembre d’une loi durcissant les conditions du regroupement familial et réduisant encore plus les possibilités des étrangerEs malades de vivre auprès de leurs proches.

Nous sommes des malades du sida. Nous refusons que le droit des malades séropositifVEs soit réduit dans le débat politique à une question d’exception humanitaire si facilement médiatisable. Après vos propos et les promesses de votre épouse, il est désormais de votre devoir de réaffirmer :

 La protection contre l’expulsion et la régularisation des étrangers ne pouvant se soigner effectivement dans leur pays d’origine,
 La possibilité pour ces personnes de vivre avec leur famille en France.

Act Up-Paris