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Placébo contre ténofovir un essai à faire vomir

vendredi 1er octobre 2004

Alertés en juin dernier, nous ne cessons de dénoncer les pratiques du laboratoire Gilead qui mène sur les prostituées des pays du Sud des essais relatifs au ténofovir en dehors de toute règle éthique.

Depuis le milieu des années 90, alors que les grands laboratoires s’apprêtaient à mettre sur le marché les antiprotéases qui, depuis ont permis au sein de puissantes combinaisons antirétrovirales (HAART) de prolonger la vie des personnes vivant avec le VIH, on s’interroge sur la capacité de ces molécules (et en particulier des analogues nucléosidiques et nucléarisations) à servir de traitement prophylactique destiné à prévenir l’infection à VIH. Gilead, avec son ténofovir, n’a pas fait exception. Les essais menés in vitro ont été encourageants. Ceux menés chez le singe, dont les résultats ont été présentés en juillet 2003 à la Conférence de l’IAS à Paris, ont confirmé les espoirs dont est porteuse la molécule dans ce domaine.

L’étape suivante devait évidemment être de tester le produit chez l’être humain, à travers un essai randomisé, ténofovir contre placebo. Il s’agit de comparer les résultats de deux groupes, l’un recevant effectivement la molécule, l’autre prenant un comprimé ayant le même aspect mais ne contenant pas de principe actif. Du fait de la faible probabilité, en population générale, d’être exposé au VIH dans un pays du Nord, il serait nécessaire d’inclure dans un tel essai un très grand nombre de participantEs pour déboucher sur des résultats significatifs. Un tel recrutement nécessitant des moyens financiers et logistiques considérables (que Gilead n’a pas souhaité mettre en œuvre) il a été nécessaire de trouver un échantillon de population pour servir de base à l’essai.

Depuis un an, des essais sont lancés pour tester in vivo les capacités préventives du ténofovir. Ils sont financés par la Fondation Bill et Melinda Gates, mis en place grâce au support logistique du laboratoire Gilead - qui fournit gratuitement le ténofovir et le placebo - et réalisés par des ONG de terrain. La fondation Bill et Belinda Gates (BBG) a accordé un financement de 6,5 millions de dollars à Family Health International (FHI) pour le lancement de ce projet de recherche clinique. On a choisi d’y inclure des prostituées de trois pays africains (Cameroun, Ghana, Nigeria) et du Cambodge. Ceci permet de recruter de personnes séronégatives appartenant à un groupe fortement exposées à un risque de contamination par le VIH du fait de leur activité. Il est ainsi possible de réaliser un essai dont l’effectif est bien plus réduit que si on l’avait mené en population générale et qui permet de montrer une différence statistiquement significative entre les deux bras de l’essai : plus simple, plus rapide et moins coûteux !.

En choisissant, en raison de coûts moindres, des prostituées pour mener cet essai, Gilead leur fait courir un risque supplémentaire alors que, déjà, elles peinent à déployer des stratégies de prévention du VIH/sida efficaces. Les prostituées constituent souvent un groupe précarisé du fait de sa situation légale et sociale caractérisée par l’absence de statut, une non-reconnaissance de leurs droits et une stigmatisation toujours croissante. Les répressions policières et les confiscations de préservatifs-> mot1261 par les représentantEs des forces de l’ordre, la difficulté d’accès aux actions de prévention et les perpétuelles négociations avec les clients pour imposer des rapports sexuels protégés sont autant d’obstacles à des conditions de vie décentes. Cet essai peut laisser penser aux personnes incluses, même s’il leur est expliqué qu’un des deux bras est placebo, que le ténofovir peut les protéger des risques de contamination, alors que cet effet prophylactique n’est pas encore démontré.

Au Cameroun

L’essai conduit par FHI au Cameroun, au Nigeria et au Ghana, nous paraît ne pas répondre de façon satisfaisante à toutes nos questions. La prise en charge psychosociale et les moyens mis en œuvre pour favoriser l’usage du préservatif sont nettement insuffisants, voire ridicules : seulement 5 conseillers et un médecin pour 400 prostituées, pas d’accès au préservatif féminin, pourtant beaucoup plus facile à utiliser pour les prostituées dans la négociation avec leurs clients. Mais, scientifiquement, il faut des contaminations pour que les résultats de l’essai soient intéressants...

Si toutes les précautions de prévention et d’encadrement étaient prises, il est certain que l’essai devrait recruter un effectif beaucoup plus important pour que la différence de contamination entre le groupe placebo et le groupe ténofovir soit statistiquement significative. Avec ce même souci de sécurité des personnes, l’opposition intérêt des personnes/intérêt scientifique est extrême : ne peut-on pas tester ce produit sur une population moins vulnérable que les prostituées, lesquelles cumulent le désavantage d’habiter des pays dans lesquels l’accès aux soins et aux traitements est restreint, voire inexistant, et le fait d’exercer une profession à risques, encore augmentés par la pauvreté du Cameroun et des autres pays dans lesquels ont lieu l’essai ?

Le cœur du dossier n’est pas tant une opposition éthique/scientifique, qu’un duel éthique/économique. Là encore, si le recrutement de l’essai ne ciblait pas une population « contrainte » à la prise de risque, il faudrait considérablement augmenter les effectifs et, par conséquent, le coût de l’essai. En faisant cet essai en Afrique et en Asie, Gilead et la fondation BBG savent qu’ils y trouvent une population vulnérable tant sur le plan des pratiques que d’un point de vue matériel, des femmes à même de leur permettre de réaliser un essai à moindre coup. C’est donc bien d’argent dont il est question et par conséquent du prix de la vie. Pour Gilead et la fondation BBG, la vie d’une femme du Sud ne vaut pas celle d’une femme occidentale.

L’essai ténofovir DF prévoit un suivi et un accès au traitement pour les Infections sexuellement transmissibles (IST) des participantes. On pourrait penser que ce dispositif a quelque chose de généreux. En fait, cela n’est rien d’autre qu’un moyen de fidéliser les prostituées et de minimiser les risques de « perdues de vue ». Il se trouve par ailleurs que les examens de suivi sont nécessaires à la validation scientifique de l’essai. De même le montant de défraiement fixé à 2 750 FCFA relève d’un cynisme inouï. En effet, un rapide calcul permet de comprendre que cette somme a été fixée d’une part pour payer les frais de transport (500 F pour le taxi) et d’autre part pour payer le manque à gagner des prostituées (2 150 F, soit l’équivalent de deux passes, tarif plancher à Douala).

Que se passera-t-il pour les prostituées qui seront dépistées séropositives lors des examens de pré-inclusion ? On ne le sait pas, mais on s’en doute. Au Cameroun, le promoteur prévoit d’adresser les femmes qui deviendront séropositives dans le courant de l’essai au dispositif d’accès aux soins et aux traitements, mis en place dans ce pays par des ONG et le gouvernement. Pourtant, s’il est vrai qu’au Cameroun, l’accès au traitement est moins difficile que dans d’autres pays d’Afrique, il reste encore incertain. On évalue à un million le nombre de personnes infectées par le VIH, soit une prévalence de 15 % (de l’avis de tous nos interlocuteurs et interlocutrices, ces chiffres sont sous-évalués), et le nombre de personnes ayant un besoin urgent d’antirétroviraux à 40 000 personnes (actuellement seules 10 000 sont sous traitement). Il est donc particulièrement honteux que le laboratoire Gilead, qui fournit gratuitement le ténofovir et son placebo pour l’essai, n’ait pas également prévu une mise à disposition gratuite d’antirétroviraux pour les participantes qui en auraient besoin.

Au Cambodge

Women’s network for unity (WNU) est une association de travailleuses du sexe qui regroupe près de 5 000 membres sur l’ensemble du Cambodge. L’association défend le droit des prostituées à travailler, elle lutte contre le trafic, les violences faites aux femmes et pour un changement de la loi sur la prostitution. Le 29 mars 2004, WNU tenait la première conférence de presse de son histoire à Phnom Penh afin de dénoncer cet essai inéthique. 960 prostituées sont classées en deux groupes dont l’un recevra du ténofovir et l’autre un placebo ayant le même aspect, mais sans principe actif. En échange de leur inclusion dans l’essai, elles recevront des soins médicaux gratuits, des conseils préventifs et 3 $ par mois.

Si elles dénoncent cet essai c’est notamment à cause des recruteurEs qui, pour les convaincre d’intégrer la recherche, affirment que la molécule est efficace et sans effets indésirables notables. Ce manque d’honnêteté et d’information fiable instaure un climat de méfiance de la part des travailleuses du sexe à l’égard des promoteurEs de l’essai. Les promoteurEs se sont approchéEs des prostituées en cachant le nom de la molécule et de l’ONG locale qui encadre l’essai.

Les principaux effets secondaires liés à la prise du ténofovir sont connus. Ce sont des diarrhées, des vomissements, des problèmes rénaux et, à plus long terme, l’ostéoporose. Les femmes craignent que les effets indésirables ne les empêchent de travailler et de subvenir aux besoins de leur famille, c’est pourquoi WNU réclame la garantie d’obtenir des soins gratuitement durant les 30 années suivant l’essai et non pas uniquement pendant la durée de celui-ci. Cette revendication qui pour certainEs parait excessive, s’explique en partie par le fait que la prostitution apparaît pour ces femmes comme étant la seule ressource financière possible dans un pays dévasté par les Khmers Rouges et en plein marasme économique. L’opacité entretenue par les recruteurEs leur fait craindre les pires choses concernant la prise de cette molécule et les éventuels effets indésirables. Enfin, il faut préciser qu’aucun traitement antirétroviral n’est proposé en cas de contamination durant l’essai.

Quant au bénéfice direct qu’elles pourraient retirer de leur inclusion dans l’essai, il est quasi nul puisqu’elles ne pourront jamais s’offrir un tel traitement qui se verra d’abord certainement commercialisé a un prix élevé dans les pays du Nord. Le principal bénéficiaire en est Gilead qui réalise des essais à moindre coût dans les pays du Sud en utilisant systématiquement des travailleuses du sexe. Le coût d’un essai réalisé dans les pays du Sud est jusqu’à 60% moins élevé et un quart des essais mené au Sud sont jugés inéthiques. Les prostituées quant à elles ne peuvent bénéficier que de soins médicaux inclus dans le cadre de l’essai, ce qui peut se voir comme étant un facteur d’incitation à participer à cet essai puisque aucun système de soin digne de ce nom n’existe au Cambodge.

La fin justifie les moyens ?

Les promoteurEs doivent consulter les associations de prostituées pour élaborer une prévention efficace, afin qu’ils et elles aient conscience des réalités sociales et économiques des prostituées cambodgiennes. Le fait de dire que le ténofovir est efficace peut entraîner de manière quasi certaine un relâchement de l’utilisation du préservatif qui faciliterait la contamination des travailleuses du sexe et de leurs clients. Gilead va favoriser la pandémie. Si l’information diffusée à l’occasion du lancement de cet essai n’est pas effectuée avec plus de clarté, des implications dans le domaine de la prévention risquent de faire des victimes ; d’autres pourraient se contaminer en prenant du ténofovir en préventif, sur la base de rumeur. Les femmes hétérosexuelles mariées sont les plus touchées par le VIH, elles sont essentiellement contaminées par leur mari. Même si les chercheurSEs leur donnent des conseils et des préservatifs, ces prostituées pourront se croire protégées du VIH tant qu’elles resteront incluses dans l’essai alors qu’aucune ne sait si elle prend la véritable molécule ou le placebo. Un essai réunissant uniquement des travailleuses du sexe nécessite de la part des promoteurEs une écoute de celles-ci, de leurs pratiques qui sont souvent liées à des impératifs économiques, au rapport de force avec un client, unE tenancièrE de bordel, unE proxénète.

En 1994, des prostituées thaïlandaises, appelées « beer girls » parce qu’elles travaillent dans les bars, se sont plus ou moins vues contraintes d’intégrer un essai testant des microbicides parce que les tenancièrEs de bordels passaient des accords tacites avec les promoteurEs d’essai. Plusieurs filles se sont confiées à EMPOWER, association de travailleuses du sexe du nord de la Thaïlande pour témoigner sur les conditions de l’essai. L’une d’entre elles a rapporté que lors d’un entretien avec le/la médecin, elle lui confia qu’elle n’insistait pas toujours auprès de ses clients pour imposer le préservatif : elle désirait par ce biais obtenir des informations sur les risques de contamination VIH qu’elle avait pu prendre. Le médecin a simplement noté ses dires sans formuler le moindre conseil de prévention. Une autre fille a témoigné et expliqué que du fait de la présence du tenancier de bordel lors de sa visite chez le médecin, elle c’est tue et n’a pas mentionné ses craintes de peur de représailles. Sur les 100 femmes ayant participé à cet essai microbicide en 1994 et qui ont témoigné auprès d’EMPOWER, 7 à 10 années plus tard, toutes sont mortes du sida. Pour que cet essai ténofovir soit éthique, il ne faut pas calquer un protocole pré-établi qui consisterait à nier la parole des prostituées, leurs pratiques et leurs questions.

De Bangkok

La conférence de Bangkok a été l’occasion pour les différentes associations de travailleuses du sexe du Sud-Est asiatique d’afficher leurs revendications et de gagner en visibilité auprès de leurs gouvernements et aussi auprès de la communauté scientifique et activiste. Act Up-Paris et l’Asian pacific network of sex workers (APNSW) se sont associés pour interrompre un symposium commercial du laboratoire Gilead afin de dénoncer le caractère inéthique de ses différents essais. Si le laboratoire pharmaceutique n’est pas directement le promoteur, il fournit néanmoins gratuitement sa molécule. Act Up-Paris dénonçait le manque d’encadrement médico-social, un accès restreint aux préservatifs masculins et inexistant en ce qui concerne le préservatif féminin et le fait qu’en cas de contamination au VIH durant l’essai, il n’y ait aucune prise en charge médicale, ni antirétroviraux. Cette collaboration entre Act Up-Paris et APNSW fut l’occasion de comparer le caractère inéthique des différents essais conduits au Cambodge et au Cameroun. Par deux fois, nous avons pu faire entendre la parole des travailleuses du sexe et de leurs revendications. D’abord lors du symposium de Gilead plus de 40 prostituées cambodgiennes sont montées sur scènes afin de dire pourquoi elle refusaient de participer à l’essai ténofovir devant les dirigeantEs méduséEs de la firme pharmaceutique. Le lendemain matin, le stand commercial de Gilead était fermé et recouvert de faux sang. Une fois investi il a permis la distribution de nos publications respectives relatives à l’essai et l’organisation improvisée d’une conférence de presse dénonçant les essais dont les bénéfices reviendront à Gilead. Les prostituées cambodgiennes ont ainsi réitéré leurs revendications concernant l’accès au traitement ARV, une prise en charge médicale s’étalant sur plusieurs années après l’essai et l’élaboration du protocole d’essai avec leur collaboration et leur consentement. Si la presse occidentale est restée relativement discrète à propos de ces deux évènements, l’information a été très bien reprise dans les journaux thaïlandais et cambodgiens.

Le 12 août 2004, le Premier ministre cambodgien Hun Sen annonçait l’arrêt de l’essai Gilead en « s’inquiétant des possibles effets néfastes que les essais de nouvelles molécules pourraient avoir sur la santé de son peuple ». Il affirmait que son pays ne laisserait plus ses habitantEs intégrer des essais de molécules au péril de leur vie. Il a aussi spécifié que son peuple ne pouvait continuer à servir de cobaye. Malheureusement, en ce qui concerne les prostituées camerounaises, il est assez difficile d’imaginer une telle organisation et une telle pression auprès du gouvernement et des investigateurEs de l’essai. Les Camerounaises n’ont effectivement pas forcément conscience d’être des prostituées, et d’être exposées au VIH du fait de leur comportement sexuel à risque. Elles ne se définissent pas en tant que travailleuses du sexe et elles n’ont donc aucune réflexion concernant leur condition et de quelconques revendications. L’essai a démarré le 15 juin dernier au Cameroun.

L’arrêt de l’essai cambodgien a été une onde de choc pour Gilead ainsi que pour la communauté scientifique et activiste sida du monde entier. Plus de 20 ans après le début de l’épidémie qui ne cesse de s’étendre en Afrique et maintenant en Asie, l’utilisation du ténofovir DF en préventif représente un grand espoir pour endiguer la propagation de l’épidémie, surtout depuis qu’il apparaît de plus en plus difficile d’élaborer un vaccin anti-VIH et que le préservatif est de plus en plus perçu comme une contrainte. Cependant, il nous apparaît inadmissible de conduire un essai qui ne respecte aucune règle éthique qui nie la parole des prostituées et n’offre aucune garantie de soins. De plus, si les essais sur le ténofovir DF conduits sur des animaux démontrent des résultats plus qu’encourageants en ce qui concerne la prévention VIH, nous ne savons rien de son efficacité lorsqu’il est testé sur des êtres humains. Si cette barrière n’atteint pas le maximum de protection, cette molécule va poser de sérieux problème en matière de prévention et risque de contrebalancer le rôle du préservatif qui est jusqu’à présent le seul moyen de se protéger à 100 % d’une exposition au VIH. Si le ténofovir DF n’est, par exemple, efficace qu’à 60 %, devrons-nous accepter sa commercialisation en traitement préventif capable d’empêcher la contamination par le VIH alors que la prise de cette molécule risque de ne pas se voir accompagnée de l’utilisation du préservatif ?

En mars 2004, déjà, Gilead n’avait pas jugé utiles de rencontrer directement les prostituées cambodgiennes. Lors de la conférence à Bangkok, le laboratoire a encore montré son mépris des prostituées en leur donnant à deux reprises des rendez-vous auxquels ils ne sont pas venu. Notons que ni Act Up-Paris, ni les travailleuses du sexe cambodgiennes n’avaient demandé l’arrêt pur et simple de l’essai mais sa suspension afin de permettre une concertation avec les personnes susceptibles d’y être incluses au vue de le rendre éthiquement acceptable. Ainsi au Cambodge le laboratoire Gilead en refusant, de parler avec les prostituées, à lui-même mis en place les conditions qui ont poussé le gouvernement à interrompre son essai.

Ces essais sont menés en dépit de toutes les règles éthiques qui encadrent les recherches biomédicales menées dans les pays du Nord et qui devraient également encadrer celles menées dans les pays en développement.

Cet essai relatif aux capacités préventives d’une molécule nécessiterait un accompagnement dans les stratégies individuelles de prévention. Pour parer au risque de considérer cette molécule comme un outil de prévention qu’elle n’est pas tant que cela n’a pas été démontré et pour assurer la sécurité des personnes incluses, il conviendrait de mettre à disposition des préservatifs masculins et féminins, de mettre en place un dispositif de counseling individuel et de développer un travail d’empowerment et d’éducation nécessaire à la promotion de stratégies de prévention. Ces dispositions sont très insuffisantes dans les essais actuellement menés. Ainsi, pour des raisons de facilité, de rapidité et de coût moindre, la Fondation Bill et Melinda Gates et le laboratoire Gilead font prendre des risques de contamination supplémentaires aux personnes prostituées incluses dans cet essai en profitant de leur situation de précarité légale et sociale. Si, à cause du caractère non éthique de cet essai, la piste pour trouver une molécule capable d’empêcher la transmission du VIH est abandonnée, Gilead et la fondation BBG en seront responsables.

L’accès aux traitements et aux soins n’est pas prévu pour les personnes découvertes séropositives à l’entrée dans l’essai, ni pour celles devenues séropositives en cours d’essai. Il devrait pourtant s’agir de l’engagement minimal des promoteurEs de l’essai que de prendre en charge les personnes séropositives qui acceptent de se soumettre à cette recherche et celles qui sont tombées malades au cours de son déroulement.

Nous exigeons :

 que Gilead cesse de prendre les prostituées des pays en développement pour des cobayes à peu de frais ;
 l’arrêt immédiat des essais ténofovir prophylactique destinés à prévenir l’infection à VIH dans le monde tel qu’ils sont menés actuellement ;
 que les personnes déjà sélectionnées et dépistées séropositives ou qui le sont devenues depuis le début des essais soient entièrement prises en charge par Gilead avec un suivi médical, des traitements pour les infections opportunistes et des antirétroviraux si besoin ;
 que les laboratoires et les agences de recherche sur le VIH se refusent à organiser des essais dans lesquels l’insuffisance des moyens entraîne des concessions inacceptables sur l’éthique.