Accueil > Prévention > La communauté que nous voulons

La communauté que nous voulons

vendredi 11 juin 2004

EST SEXUELLE. On y refuse de choisir ses amants en fonction de leur statut sérologique, on y utilise donc systématiquement le préservatif et du gel. On y invente et valorise des pratiques sexuelles non contaminantes, comme autant de réponses à l’épidémie de sida.

A DE LA MÉMOIRE. On s’y rappelle que l’hécatombe qu’elle a connue a été la conséquence de l’attentisme homophobe des pouvoirs publics et on est décidé à ne pas s’y laisser prendre une nouvelle fois. On n’y a pas oublié ceux qui sont morts, et on estime que la multiplication des pratiques à risques, la poursuite et l’accroissement du rythme des contaminations par le VIH, font injure à leur souvenir.

EST INTRANSIGEANTE. On y trouve criminels les discours bareback et noKpotes, pathétiques ceux qui les tiennent, et minables ceux qui les appliquent. On y considère que les patrons de bordels qui refusent de mettre en place des politiques efficaces de prévention et se lavent les mains du fait que des clients soient contaminés dans leurs murs, sont complices du sida, et on entend le faire savoir.

EST MOBILISÉE. On y est personnellement engagé quand on assiste, à côté de soi, dans une backroom ou un lieu de drague, à une baise non protégée. On s’y sent collectivement responsable chaque fois qu’une nouvelle personne est contaminée, parce qu’on n’a pas tout fait pour l’empêcher.

EST INQUIÈTE. On y sait qu’à de rares exceptions, on n’a pas pris la mesure de la catastrophe représentée par le « relapse ». On y redoute en France une augmentation aussi massive du nombre d’homosexuels et de bisexuels séropositifs qu’en Grande Bretagne et aux Etats-Unis. On y attend avec appréhension la publication des chiffres des nouvelles contaminations.

SAIT COMPTER. On n’y ignore pas qu’il n’y a jamais eu, dans toute l’histoire de l’épidémie, autant de gays vivant avec le VIH et s’affrontant quotidiennement aux difficultés de la séropositivité et aux drames du sida. On y exclut que le sida soit une histoire oubliée et la lutte contre l’épidémie un dossier clos.

EST HYSTÉRIQUE. On y croit à l’action politique, on y croit que les destins des minorités sont liés, on y croit en l’action collective, on aime y manifester. On y combat une homophobie qui règne en dehors d’elle, mais aussi dans ses propres rangs. On y juge que l’idée de communauté, avec ce qu’elle exige de solidarité et ce qu’elle implique de fierté, n’est pas un vain mot.

EST FIÈRE D’ÊTRE IDIOTE. On y trouve que le politiquement correct a de la vertu, et que la souffrance et la violence n’en ont pas. On y est certain que qui ne nous aime pas est notre ennemi. On y pense qu’il est bon d’être gai et vivant.

La communauté que nous voulons n’est pas celle que nous avons.


Ce texte a été publié sous forme d’affiche. Elle est actuellement collée dans les rues de Paris. Une version au format pdf est disponible ci-dessous.