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Un rapport en toc

mercredi 24 mars 2004

En Novembre 2002, le rapport remis à Nicolas Sarkozy par Anne-Marie Escoffier, et qui n’a toujours pas été rendu public à ce jour, affirmait que les étrangers malades seraient de faux malades et accuse ouvertement les médecins de complaisance. Act Up-Paris a décidé de publier le rapport Escoffier.

Le 11 octobre 2002, l’Inspection Générale de l’Administration a été chargée par le ministère de l’Intérieur « d’examiner si la législation actuelle laisse subsister des situations inextricables [...] et de proposer les mesures d’ordre permettant d’assurer l’homogénéité de traitement des dossiers individuels par les préfectures sur l’ensemble du territoire ». Un mois plus tard, en novembre 2002, Anne-Marie Escoffier (Inspectrice générale de l’Administration) remettait au cabinet Sarkozy un rapport intitulé Le réexamen des dossiers des étrangers en situation irrégulière. Ce rapport télécommandé, qui a de fait fortement préparé les circulaires Sarkozy des 19 décembre 2002 et 10 janvier 2003, ne comporte que 45 pages, dont moins de deux sont consacrées à ce que son auteur qualifie pourtant de « faille majeure du système » et « d’ultima ratio des sans-papiers » : l’article 12 bis 11°, qui permet l’accès à un titre de séjour pour soins.

Anne-Marie Escoffier affirme ainsi sans scrupule que beaucoup de malades seraient de faux malades, et accuse ouvertement les médecins de complaisance. Elle parle ainsi de « certificats de complaisance éventuellement monnayés », dit que « la notion d’« exceptionnelle gravité » est, dans bien des cas, totalement perdue de vue », ou encore que « certains dossiers sont ouvertement douteux, alors même que les certificats émanent de médecins agréés ou assermentés ». Pourtant, les médecins consultés n’ont pas ou peu vu leurs avis repris dans ce rapport, qui ne se fonde de plus sur aucune enquête précise des difficultés rencontrées par les médecins des DDASS.

Par ailleurs, Anne-Marie Escoffier, en voulant restreindre le champ d’application du 12 bis 11°, feint à dessein d’ignorer, dans sa conception de la notion d’« exceptionnelle gravité », que des informations officielles existent quant à l’accès à une prise en charge médicale dans les pays d’origine, comme par exemple celles du programme ESTHER. Quelle que soit la pathologie, si le malade n’a pas accès effectivement (quantitativement, financièrement, géographiquement, etc.), aux traitements et au suivi qui l’accompagne, les conséquences sont de toute façon pour lui d’une exceptionnelle gravité.

Enfin, si l’on se réfère aux rapports annuels du ministère de l’Intérieur au Parlement, en 2002, on note seulement 0,3% de demandes de régularisation au titre de l’article 12 bis 11°. Et cette proportion est la même depuis 1998. Il est mensonger, dès lors, de parler de « faille majeure du système ». Et il est criminel de contraindre des malades étrangers à la clandestinité en leur rendant de plus en plus difficile l’accès à un titre de séjour, quand dans le même temps on supprime l’Aide Médicale d’Etat. Pour toutes ces raisons, Act Up-Paris rend aujourd’hui public ce rapport.