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Silence, on meurt

mercredi 25 juin 2003

Laurent Jacqua, malade du sida, n’a de cesse de dénoncer l’incompatibilité de la maladie avec la prison. Incarcéré à Bois d’Arcy, il constate la multiplication des brimades, des humiliations et la dégradation de la vie au quotidien dans les prisons, depuis que Dominique Perben a notamment ordonné des fouilles généralisées. Voici son témoignage.

« Lundi 5 mai 2003 aux alentours de 19h30, des surveillants encagoulés et encadrés des surveillants chefs et de membres de la direction de la maison d’arrêt de Bois d’Arcy ont fait une descente au quartier d’isolement pour une fouille surprise.

L’un après l’autre nous avons été fouillés. Ils sont venus me chercher en dernier et m’ont conduit à la bibliothèque du QI (quartier d’isolement). Plusieurs agents encagoulés munis d’uniforme anti-émeute et casqués m’ont alors entouré et il m’a été demandé de me mettre à nu pour la fouille. Je me suis donc déshabillé sans opposer de résistance. Une fois nu, ils m’ont demandé de me retourner. J’ai été plaqué au mur et l’un des surveillants m’a palpé l’entre jambe en touchant mes parties sans ménagement.

Considérant que c’est une atteinte à ma dignité, je me suis retourné en protestant sur la façon dont j’étais fouillé. Ils m’ont alors demandé d’un ton agressif de me baisser et de tousser, ce que j’ai refusé. Le surveillant chef a alors fait signe à ses surveillants cagoulés, et ceux-ci, au nombre de quatre ou cinq, m’ont plaqué au sol de façon violente en m’assénant divers coups au visage et sur le corps.
Ils m’ont ensuite contraint par force, a écarter les jambes pendant que l’un d’eux procédait au contrôle par attouchements au niveau des testicules au point de me faire mal.

Maintenu au sol, on m’a alors une fois de plus demandé de tousser, j’ai refusé, ils m’ont menotté violemment en me blessant aux avant-bras, puis j’ai été conduit manu militari, nu, à travers la détention sous le regard du personnel tant féminin que masculin pour être placé dans une promenade du quartier disciplinaire où j’ai attendu la fin de la fouille.

Vers 21h, je regagnai ma cellule avec quelques blessures et un œil enflé.
Mardi 06 mai 2003, je faisais constater mes blessures par le médecin visitant le quartier d’isolement. Celle-ci établira un certificat médical. Extraits : "[...] Il présente une coupure de trois cm au niveau de l’avant-bras, des hématomes et ecchymoses au niveau des deux bras, une érosion superficielle au bras droit. Il présente d’autres ecchymoses sur le dos et genou gauche. Il présente également un œil droit rouge, avec une vision un peu floue. Il se plaint de douleurs également au niveau du testicule gauche [...]".

Nous sommes deux à avoir été tabassés ce soir là.
Les matons cagoulés arrivent dans les QI, la répression s’intensifie.


Ce témoignage, comme beaucoup d’autres, a également été publié sur le site www.maincourante.eu.org

Laurent Jacqua vient de publier La guillotine carcérale, silence, on meurt] aux éditions Nautilus.