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rapport Delfraissy. La totale en 2001

Recommandations françaises pour la prise en charge thérapeutique des personnes infectées par le VIH.

janvier 2001

Ces recommandations ont été publiées, de façon un peu symbolique, le 1er décembre 2000. Elles reflètent la réflexion d’un groupe de cliniciens, de virologues, de pharmacologues auquel les associations de malades ont participé, en particulier Act Up.

Elles montrent une nette évolution en ce qui concerne l’initiation d’un traitement antirétroviral. Depuis que l’on sait que l’éradication du virus, en l’état actuel des thérapeutiques dont on dispose, n’est pas un objectif réaliste, que le chemin sera très long, accompagné d’effets indésirables multiples, il est recommandé de ne pas commencer à traiter trop précocément les séropositifs, et ce, en fonction du nombre de CD4 et non plus uniquement en tenant compte de la charge virale.

Avec quelles combinaisons d’antirétroviraux faut-il traiter aujourd’hui en première intention ? Depuis les dernières recommandations de 1999, certaines molécules ont pu être mieux évaluées : leur efficacité, leurs interactions, leur toxicité cutanée et hépatique et leurs effets indésirables métaboliques et neurologiques sont aujourd’hui mieux connus et documentés. Seule une trithérapie est recommandée, avec les trois classes de médicaments, 2 IN (Inhibiteur Nucléosidique) plus 1 IP (Inhibiteur de Protéase), 2 IN plus 1 INN (Inhibiteur Non Nucléosidique) enfin 3 IN. Les nouvelles molécules, encore en cours d’évaluation, sont présentées dans le rapport.

Une place particulièrement importante est faite au ritonavir en association avec d’autres IP. Cette molécule, en raison de son effet « booster » occupe une place à part et doit être monitorée à l’aide d’un suivi pharmacologique rigoureux.

Le chapitre consacré aux anomalies métaboliques montre clairement à quel point leur mécanisme reste à élucider, les définitions des lipodystrophies restent à formuler. En attendant, leur prise en charge médicale est systématiquement recommandée.

L’ensemble des recommandations s’appuie sur des notions qui ne sont parfois que partiellement validées (utilité des cytokines, interleukine 2, INF, immunothérapie, traitement des primo-infections, interruptions thérapeutiques). Des essais sont en cours ou en préparation. Les experts du rapport s’appuient au plus près sur les pratiques actuelles sans anticiper au-delà du possible.

Les dosages plasmatiques et les tests de résistance aux antirétroviraux ne sont plus remis en question. Leur utilisation s’impose d’elle-même. La demande croissante d’aide à la procréation de nombreux couples sérodifférents a été entendue et la mise en place d’un dispositif efficace doit permettre d’y répondre. Il semble que des décisions aient été prises dans ce sens !

L’incitation au dépistage des hépatites reste insuffisante. Un nombre important de personnes sont coinfectées par le VIH et le VHC. Leur prise en charge en concertation avec les hépatologues est délicate. Dans ce domaine également des essais en cours devraient améliorer les possibilités de traitement.

Ce rapport reflète sincèrement une grande partie des pratiques thérapeutiques en milieu hospitalier pour le suivi des patients VIH. Malheureusement, il n’aborde pas le problème des patients en échecs multiples, dont le nombre est évalué de façon consensuelle à environ 6 à 7 % des malades traités. Sans doute, depuis 1999, aucune stratégie n’a-t-elle pu être validée (mégathérapies, interruptions thérapeutiques avant de nouvelles multithérapies). Il est nécessaire de rappeler, pour ces personnes, l’urgence d’un accès à de nouvelles molécules, souvent de classes thérapeutiques différentes, donc doublement intéressantes. Molécules que les laboratoires pharmaceutiques nous distillent au compte-gouttes.

Depuis les premières recommandations pour le traitement précoce de la maladie à VIH rédigées par le Pr. Dormont à la demande du ministre Claude Evin, par deux fois la prise en charge globale des patients a été abordée, en 1993 et en 1996. A ces occasions, non seulement la prise en charge hospitalière et les soins palliatifs étaient détaillés, mais aussi toute la thématique extra-hospitalière (toxicomanie, femmes, prisons, etc.) à la demande, en autre, de Bernard Kouchner. A chaque fois, les années suivantes, sont parues des mises à jour focalisées pour l’essentiel sur le thérapeutique en milieu hospitalier. Le Pr. Dormont, pour rédiger ces recommandations, avait su réunir des groupes d’experts ayant des compétences extrêmement diverses. Avec l’aide également du Dr Bourdillon, ce travail avait eu le grand mérite d’actualiser, presque chaque année, la prise en charge des séropositifs.

Il saute aux yeux, en ce début de 2001, que les prochaines recommandations ne pourront pas se limiter au seul domaine thérapeutique. Le Pr. Delfraissy pense également qu’il sera souhaitable et inévitable de rédiger à nouveau un grand rapport qui englobera l’ensemble de la prise en charge. Il sera utile d’évaluer comment, à la lumière des recommandations précédentes, les pratiques ont évolué en ce qui concerne les soins palliatifs par exemple ou dans le monde carcéral. Un bilan des possibilités de soins et d’aide dans de multiples domaines est indispensable : en ville, en situation de pauvreté, d’immigration, de toxicomanie. Sans doute faut-il repenser la prévention ! De nouveau il faudra faire appel à des groupes d’experts pluridisciplinaires, le travail sera complexe, mais il est d’une importance indiscutable.